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lechalas. — l’œuvre scientifique de malebranche

« Théotime. — Il faut, Théodore, que je vous dise une expérience que j’ai faite. Un jour, en été, je pris gros comme une noix de viande, que j’enfermai dans une bouteille, et je la couvris d’un morceau de crêpe. Je remarquai que diverses mouches venaient pondre leurs œufs ou leurs vers sur ce crêpe, et que, dès qu’ils étaient éclos, ils rongeaient le crêpe et se laissaient tomber sur la viande, qu’ils dévorèrent en peu de temps ; mais, comme cela sentait trop mauvais, je jetai tout.

« Théodore. — Voilà comme les mouches viennent de pourriture : elles font leurs œufs ou leurs vers sur la viande et s’envolent incontinent ; ces vers mangent et cette chair se pourrit. Après que ces vers ont bien mangé, ils s’enferment dans leurs coques et en sortent mouches ; et le commun des hommes croit sur cela que les insectes viennent de pourriture.

« Théotime. — Ce que vous dites est sûr, car j’ai renfermé plusieurs fois de la chair, où les mouches n’avaient point été, dans une bouteille fermée hermétiquement, et je n’y ai jamais trouvé de vers. »