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LA MATIÈRE BRUTE ET LA MATIÈRE VIVANTE[1]


II

L’ORIGINE DE LA VIE ET DE LA MORT


Dans un précédent article publié sous le même titre, j’ai cherché à établir que la matière dite brute est incapable d’engendrer la matière dite vivante et, à plus forte raison, la matière sensible, pensante et libre. C’était là contredire directement une proposition généralement accréditée au sein d’une certaine école qui se qualifie volontiers de positiviste.

J’allai même plus loin : au lieu de faire venir la matière vivante de la matière brute, j’avançai la thèse que la matière brute dérive de la matière vivante ; et, me fondant sur les résultats acquis de la science actuelle, je montrai qu’il ne serait pas bien difficile de la rendre plausible. Pour en arriver là, il m’avait fallu critiquer les idées qui ont cours sur les propriétés de la matière et passer par les deux théorèmes que voici :

1o Les propriétés des atomes ne sont pas immuables ;

2o Elles ne leur sont pas toutes inhérentes, mais elles leur viennent, en partie du moins, de l’extérieur, ou, pour parler avec plus de précision, du travail de la communauté.

J’aurais pu borner là mon étude ; mais je cédai à la tentation de pénétrer au delà des faits plus ou moins tangibles. Je quittai le terrain en apparence assez solide de la physique et de la chimie, et, remontant à l’état initial de la matière universelle, il me sembla y découvrir les facteurs importants de la vie, de la sensibilité et de la volonté.

Ce travail réclame un complément. La vie a pour corrélatif, dans l’être et dans la pensée, la mort. L’une ne s’explique pas sans l’autre. C’est de la mort que je vais traiter.

  1. Voir le numéro d’octobre 1883.