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porte dans son organisation psychologique le résultat des efforts, des expériences, des progrès et des erreurs de ses aïeux.

4o La répétition et la vie sensible. — La répétition développe notre vie active, elle émousse notre vie passive. À ce dernier point de vue, il est évident qu’elle produit un effet fâcheux en affaiblissant la fraîcheur et la force de nos sentiments et qu’elle a fourni ainsi des arguments aux pessimistes. Mais il est à remarquer que les sentiments s’associent aux idées et qu’ils peuvent dès lors non seulement conserver leur force, mais encore acquérir une force nouvelle ; ils prennent en profondeur, en variété ce qu’ils perdent en fraîcheur ; ils perdent leur caractère purement esthétique pour prendre un caractère moral, la répétition contribue à la formation du caractère et la vie peut être conçue, grâce à elle, sous un aspect optimiste.

R. Seydel. L’espace, le temps, le nombre. — Kant, tout en considérant le nombre comme une forme à priori de l’intuition pure, le faisait cependant rentrer dans la forme du temps et voyait dans l’arithmétique la science à priori du temps, comme dans la géométrie la science à priori de l’espace. Depuis quelque temps, les philosophes marquants se sont séparés de Kant sur ce point, Baumann et Zeller adoptent la formule : espace, temps et nombre ; Sigwart et Wundt y ajoutent le mouvement.

La substitution de cette formule à celle de Kant a été faite pour la première fois par Ch. H. Weisse. Un manuscrit, qui fait partie des papiers laissés par lui et qui a été écrit à la fin du printemps de 1832, mentionne la triade du nombre, de l’espace et du temps à côté de celles de l’être, de l’essence, de la réalité, et de l’arithmétique, de la géométrie, de la mécanique. En mars 1833, il communiqua ses idées sur ce sujet au public dans la Revue religieuse de l’Allemagne catholique, puis dans son livre sur l’Idée de la divinité. Il les reproduisit en 1835 dans ses Esquisses de métaphysique et, en 1865, dans la Revue de Fichte. Elles ont passé dans les écrits de ses disciples et Seydel lui-même les a exposées en 1857 dans son Système Philosophique de Schopenhauer et en 1866 dans sa Logique.

F. Tonnies. Étude sur le développement historique de Spinoza. Dernier article. — La philosophie de la volonté est en lutte avec la philosophie intellectualiste dans la quatrième comme dans la troisième partie de l’Éthique. La philosophie intellectualiste domine dans la cinquième ; il n’est donc pas facile d’apercevoir le rapport de cette dernière partie à celle qui la précède.

Spinoza a été à la fois un défenseur du passé et un prophète de l’avenir : c’est un rationaliste, car personne en dehors des mathématiques n’a fait, avec des concepts, une construction aussi grandiose ; c’est un réaliste par sa théorie des vérités éternelles et de la réalité des essences formelles, et il peut à ce point de vue être opposé à Hobbes ; c’est un idéaliste par sa conception de la divinité ; et enfin c’est un positiviste par son naturalisme.