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REVUE GÉNÉRALE. — la connaissance mathématique

trale, explication darwinienne de la finalité apparente dans la nature organique.

Notre auteur revient maintenant aux problèmes principaux de la théorie de la connaissance, tels que Kant les a posés ; il s’agit de faire la critique des concepts fondamentaux qui sont le point de départ du physicien.

Notre perception a un caractère subjectif symbolique, elle ne nous donne nullement une copie des objets extérieurs, mais des signes dont nous devons rechercher le sens.

Locke a le premier distingué les qualités des choses en primaires et secondaires, objectives et subjectives ; pour Kant tout est subjectif, tandis que F. Muller, le fondateur de la doctrine des énergies spécifiques des sens, s’en tient de fait au point de vue de Locke, et que, dans son ensemble, la science de la nature n’a pas dépassé ce point de vue. Il est, évidemment, essentiel de savoir si cette position est mieux justifiée que celle de Kant.

En premier lieu, le physicien a pleinement raison d’aller aussi loin qu’il va, en pensant que nos représentations sont purement symboliques pour tout ce qui ne concerne pas les rapports de lieu et de temps. Ainsi nous possédons un certain nombre de formes de conception (Auffassungsforme). Cette conclusion, si voisine de la doctrine de Kant, appelle une critique de celle-ci, la question du temps et de l’espace étant provisoirement écartée.

Ces formes de conception peuvent être en général considérées comme soumises à un développement dans le temps ; on doit néanmoins les considérer comme aprioriques, puisqu’elles sont étrangères aux choses mêmes, et l’hypothèse nouvelle, que si elles sont aprioriques pour chaque individu, elles ont été acquises empiriquement par l’espèce humaine, est une hypothèse insoutenable.

Dans la conception de la nature, il est possible d’écarter toutes les formes subjectives et de ne considérer que ce qui reste du monde extérieur, Abstraction faite des phénomènes de la conscience, il se réduit alors aux concepts fondamentaux de force et de matière, qu’il convient d’approfondir.

M. Kroman expose la théorie des atomes et des molécules, des corps simples et des combinaisons chimiques ; il rappelle les conceptions de Dalton, de Gay-Lussac, d’Avogadro, les travaux plus récents sur l’affinité, la valence des atomes, les lois de la thermochimie, fait ressortir les lacunes de la théorie et arrive à poser la question de la continuité ou de la discontinuité de la matière. Les particules ultimes de la matière sont-elles étendues ou non ? sont-ce des éléments matériels ou des centres de force ?