Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 17.djvu/427

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
423
ANDRADE. — conservation de la force

Pour rester dans l’ordre d’idées de la physique moderne, je trouve que les explications par le mouvement des phénomènes autrefois expliqués par la force réalisent un progrès ; au point de vue philosophique, je dis seulement deux choses.

1o Il n’est pas probable que toutes les sciences s’accommodent de cette interprétation mécanique sans la modifier.

2o Même au point de vue mécanique, les progrès de la physique mathématique me paraissent exiger soit l’emploi d’un nouveau déterminisme, soit une étude préalable permettant de trouver le système de coordonnées dans lequel un déterminisme mécanique est possible.

Je donne la première de ces deux propositions comme l’expression d’une pure opinion personnelle, et je n’y insiste pas davantage.

Quant à la deuxième proposition, je prie le lecteur de lui accorder quelque attention.

On a vu plus haut qu’il était nécessaire de distinguer parmi tous les systèmes de comparaison celui qui comportait un déterminisme mécanique ; on attribue généralement aujourd’hui l’attraction universelle aux propriétés assez mal connues d’un milieu cosmique ; s’il en est réellement ainsi, ce milieu serait la représentation physique du système de coordonnées où le déterminisme des mouvements planétaires est possible ; nous qui faisons partie du système solaire, nous nommons ce système de coordonnées l’espace absolu. Il n’y a aucune raison de croire que le déterminisme mécanique des forces élastiques, s’il existe, doive s’exprimer dans le même système Néanmoins, si on le voulait supposer, on pourrait rêver une mécanique de l’avenir qui ferait dépendre la gravitation des propriétés élastiques du milieu cosmique. La vérité est que pour le moment notre connaissance de l’élasticité est une connaissance assez élastique.

Dans la réalité, on n’a pas réussi à établir les équations fondamentales de l’élasticité d’une manière complètement indépendante des actions à distance ; et d’ailleurs, en ce faisant, on poserait ces équations fondamentales comme une propriété cinématique du milieu ; après tout, il n’importe, car la valeur de ces équations est toute provisoire et ne sera consacrée que par le contrôle expérimental de leurs conséquences les plus éloignées ; toujours est-il que leur signification reste subordonnée à la notion d’un milieu.

Si donc les propriétés physiques d’un milieu en mouvement vibratoire sont le support réel de la gravitation, il faut remarquer que les conséquences mécaniques tirées de l’extension de la forme du déterminisme astronomique à tous les phénomènes naturels, extension qui conduit en particulier au principe de la conservation de l’énergie,