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loin de la Logique de M. Liard ou de la partie consacrée à la logique dans le Traité élémentaire de philosophie de M. Paul Janet à la Logique de Port-Royal. Nous sommes fort éloigné de vouloir dire du mal de cet excellent livre ; même ce n’est pas sans regret que nous l’avons vu disparaître du programme des classes. Il faut bien convenir pourtant qu’il était devenu insuffisant. Il n’y est question qu’une fois de l’induction, telle qu’on la pratique aujourd’hui dans les sciences de la nature, et c’est dans le chapitre des sophismes. Comment se contenter d’une telle mention, en présence du développement des sciences et des succès de la méthode expérimentale, après les travaux de J. Stuart Mill et de Bain ? Les livres récents ont une tout autre allure : grâce aux nombreux exemples qu’elle emprunte aux sciences positives, à l’esprit tout moderne dont elle est comme imprégnée, la logique y devient vraiment intéressante ; du moins elle n’a plus rien de la sécheresse scolastique. Ce n’est pas que les programmes aient beaucoup changé ; mais on sait de reste que les programmes sont des cadres où l’on peut, sans les faire éclater, placer beaucoup de choses. La lettre demeure, mais l’esprit se modifie. Hâtons-nous d’ajouter qu’on ne méconnaît rien de ce qu’il peut y avoir d’utile dans la logique formelle ; il y aurait une égale puérilité et une égale légèreté à la railler ou à la proscrire et à s’y enfermer exclusivement. Il faut lui faire sa place, mais ne pas lui donner toute la place. Au fond, c’est bien ainsi que l’entendaient les auteurs de la Logique de Port-Royal ; leur œuvre, ainsi que l’atteste leur préface, est, à vrai dire, une œuvre de réaction contre l’ancien enseignement. Ils ont réduit la logique pour la rendre inoffensive ; ils la traitent un peu comme un jeu et ne se font aucune illusion sur l’utilité pratique de ses procédés. Personne n’a eu moins que ces logiciens l’idolâtrie de la logique formelle. De nos jours, il faut la réduire encore davantage ; les savants solitaires se seraient sans doute résignés sans trop de peine à ces conditions nouvelles. En dépit de l’apparence, les Logiques modernes destinées à remplacer la Logique de Port-Royal sont animées du même esprit. Il faut refaire de temps en temps de tels livres pour les approprier à des exigences nouvelles ; c’est à quoi M. Liard a complètement réussi.

Victor Brochard.

De Quatrefages (A.). Hommes fossiles et hommes sauvages. Études d’Anthropologie. Grand in-8o , xii — 644 p., avec 209 gravures et une carte. Paris, J.-B. Baillière et fils. 1884.

Dans un Avertissement d’une grande précision et d’une parfaite loyauté scientifique, M. de Quatrefages nous explique lui-même la nature et l’origine de cet ourage, le genre d’intérêt qu’il offre et les services qu’il peut rendre. À l’exception d’une seule, les onze études réuvies dans ce volume ont paru sous forme d’articles dans le Journal des