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combinaison des deux autres : nous comparons des distances verticales ou horizontales, des lignes qui s’élèvent ou s’abaissent ; les images sont distinctes, et les jeux des muscles de l’œil diffèrent. Cette étude des éléments des perceptions complexes est la partie la plus intéressante et, il nous semble, la plus instructive de la psychologie nouvelle. À vrai dire, cette théorie est sortie d’un long travail, auquel à des degrés divers ont pris part tous les psychologues, mais les expériences de M. Helmholtz sur le son, de M. Wundt sur les sensations du tact, de la vue, l’ont enrichie d’une multitude de détails, tout en lui donnant une précision nouvelle[1].

IV

Les deux méthodes que nous avons exposées répondent aux deux premières questions de la psychologie expérimentale et scientifique : Quels sont les premiers éléments de la vie spirituelle ? Comment se combinent-ils pour former les représentations ? Le troisième problème qui se pose est la suite naturelle des deux autres : c’est le problème de la coexistence et de la succession des représentations. Les perceptions sont déjà des touts complexes, mais elles sont encore des éléments qui par des combinaisons indéfiniment variées composent la connaissance. Quels sont les procédés et les lois de cette chimie mentale ? Ce dernier problème résolu, suivi dans toutes ses conséquences, la psychologie serait faite. Dans quelle mesure pouvons-nous, en lui appliquant les méthodes de la psychologie expérimentale, lui donner une solution vraiment scientifique ? Le problème de la coexistence et de la succession des représentations est double : on peut se demander selon quels rapports qualitatifs (contraste, ressemblance) les représentations s’associent ; on peut chercher la durée absolue et relative des actes psychiques.

En étudiant les perceptions complexes, on étudie les associations

  1. M. Wundt admet qu’en certains cas la perception est analogue à une combinaison chimique. Les sensations élémentaires peuvent être isolée : mais on ne retrouve pas dans les éléments les propriétés du composé qu’ils forment en s’unissant. Cette théorie très ingénieuse aurait le tort de ne donner de certaines notions (espace) qu’une explication apparente ; mais elle ne compromet en rien les résultats obtenus par les expériences sur les éléments des perceptions complexes. Quelle que soit par exemple la nature de la notion d’espace, nous n’arrivons à cette notion que sous certaines conditions déterminées qu’il importe à la science de découvrir.