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CORRESPONDANCE


Darmstadt, le 2 décembre 1881.
Monsieur le Directeur,

Dans le n° 12 de votre excellente Revue philosophique de la France el de l’étranger, M. A. Espinas s’occupe assez longuement de mon livre Sur la vie psychique des animaux ; vous me permettrez bien d’y répondre en quelques mots, dans l’intérêt de la justice littéraire aussi bien que du public de vos lecteurs. En ce qui concerne tout d’abord la remarque du commencement, que le titre et le contenu ne sont pas en harmonie, c’est sans doute le titre seul de la traduction, que je n’ai pas revue, qui à pu y donner lieu. Le titre de l’original est : Aus dem Geistesleben der Thiere, ce qui dit donc très clairement que le livre ne doit présenter que des parties ou des esquisses de cet immense domaine. Un second mal entendu, causé pareillement par une inexactitude dans la traduction de quelques mots de la préface, provient de ce que le critique admet que le livre s’annonce comme rigoureusement scientifique. Voici les mots de l’original : « nüchterne Forschung und unbefangene Wiedergabe des Gesehenen, » et ils ne se rapportent qu’aux investigations d’hommes de science et d’observateurs auxquels on peut se fier ; mais à côté de cela on fait la remarque expresse qu’une autre série plus ou moins douteuse d’observations n’a été accueillie que sur l’autorité de ceux qui les racontent et dont on cite les noms. Ceci s’applique surtout au récit de la page 182, qui parait si suspect à M. Espinas et qui est emprunté à un livre, très répandu en Allemagne, sur la Psychologie des animaux de Perty, avec indication expresse du livre et de la page. Il est très facile, dans la Psychologie des bêtes, de révoquer en doute la vérité de tel ou tel récit et la justesse de l’observation, mais très difficile de mettre à la place quelque chose qui ne puisse être contesté.

L’abondance ou la foule des récits donnés par différents observateurs en différents endroits, et s’accordant entre eux, en ÿ joignant la vraisemblance du fond, peut seule décider. Cela me semble donc encore un reproche que rien ne justifie, de dire que l’auteur n’a pas fait ou cité d’observations qui lui sont propres. De quelle utilité de pareilles observations auraient-elles été pour mon livre, débordé que j’étais par l’abondance des matériaux, qui n’ont même pu être utilisés dans toute leur étendue ? Vraisemblablement elles n’auraient fait que porter