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PÉRIODIQUES.Zeitschrift für Philosophie.

que l’œil existe, il faut que les rayons de la lumière aient été déjà sentis. L’adaptation de l’organe à la fonction suppose que la fonction préexiste, que la sensation a déjà eu lieu. » Le témoignage de l’expérience suffit d’ailleurs amplement à démontrer l’existence des représentations inconscientes. Schuster analyse le rôle de ces représentations dans le développement de la sensibilité, de l’intelligence et de la volonté. Pour prouver qu’il y a des idées héréditaires, il lui suffit d’établir qu’il y a incontestablement des tendances, des facultés ayant ce caractère. Or toute faculté, toute force est la manifestation d’une volonté, et le vouloir est inséparable de la représentation.

La réalité des idées héréditaires, et par suite celle des idées innées, ne saurait donc être contestée.

Fortalege : Du double apriori de la raison humaine dans l’entendement et dans l’intuition, à propos de la seconde édition du livre d’Otto Liebmann : sur l’analyse de la réalité.

À l’exemple de Gauss, Riemann et Helmholtz, les mathématiciens de notre temps se plaisent à discuter le problème de l’apriorité de l’espace : la théorie de Kant doit à ces efforts multipliés d’utiles correctifs et d’intéressants compléments. Mais les savants ne distinguent pas toujours assez nettement entre l’apriori de l’entendement et celui de l’intuition, entre la logique et la sensibilité. De là viennent la plupart des erreurs des nouvelles théories sur la métagéométrie. Le livre de Liebmann, l’Analyse de la réalité, en contient une habile réfutation. Liebmann est disciple de Kant, mais un disciple indépendant. Il résume ainsi la doctrine de Kant sur l’espace : « 1o Les axiomes de la géométrie euclidienne, et, avec eux, l’espace euclidien ne sont pas des nécessités logiques. 2o Mais, pour moi et pour les êtres dont l’intuition est semblable à la mienne, ces axiomes et cet espace sont inévitables, c’est-à-dire que le contraire, bien que ne renfermant aucune contradiction logique, n’est pas représentable intuitivement ce sont de pures nécessités intuitives, ou, ce qui revient au même, des intuitions à priori. 3o Comme ils me sont imposés par l’organisation de mon pouvoir intuitif, mais non par la logique, ils sont subjectifs. Car, ainsi que le dit Kant, nous ne pouvons juger si les intuitions des autres êtres pensants sont assujetties aux mêmes conditions, qui limitent notre intuition et sont pour nous inévitables. » Les récentes découvertes de la géométrie analytique n’ont fait, sur ce point, que confirmer l’enseignement de Kant et prouver définitivement que notre espace euclidien, avec ses trois dimensions, hauteur, largeur et profondeur, n’est qu’un cas particulier entre une infinité d’autres dont la pensée et le calcul peuvent rendre compte.

Pour les nouveaux géomètres, notre espace doit être défini : « une diversité étendue en trois sens (eine dreifach ausgedehnte Mannigfaltigkeit) ou un espace à trois dimensions est un espace dans lequel le simple ou le point est déterminé toujours et uniformément par trois coordonnées ou par trois grandeurs variables et indépendantes