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soin au point de vue de l’organe qui la fournit, des diverses qualités en qui elle se diversifie, des éléments multiples qui la composent, des limites entre lesquelles elle se développe, de son rapport avec la motilité des organes, de sa durée minimum, des erreurs normales auxquelles elles donnent lieu. La liste comprend : l’ouïe, la vue, les sensations de la peau, le goût et l’odorat, les sensations musculaires. Ce chapitre ne laisse rien à désirer ; il est précis, et, à le prendre comme un résumé, il est complet ; c’est volontairement que l’auteur s’est restreint aux points qu’il a regardés comme essentiels et a rejeté comme secondaires d’autres considérations intéressantes qui se présenteraient en grand nombre au psychologue sur cette inépuisable question (par exemple le degré d’éducabilité de chacun des sens). Dans le chapitre suivant sont posées des questions générales concernant la perception, sous ce titre : « Induction des sensations ». Touchant l’objectivation ou la relation de nos représentations sensorielles au monde extérieur, l’auteur présente une théorie personnelle que l’on retrouvera plus développée au livre second, au moment où, à propos de la connaissance rationnelle, les idées d’espace et de temps sont plus complètement étudiées. C’est la théorie de l’onde réflexe perceptive. Nous ne pouvons nous y arrêter.

L’élaboration des données sensorielles par les centres nerveux encéphaliques est l’objet du second livre. On y rencontre tout d’abord, bien à sa place, un exposé de l’anatomie de ces centres ; ce qu’on sait des fonctions de leurs différentes parties est résumé ensuite d’après les travaux les plus récents de Lussana, de Luys, de Carpenter, de Schiff, de Wundt et de Ferrier. Les localisations cérébrales obtenues jusqu’ici figurent également dans ce chapitre. L’auteur examine en unissant les questions suivantes : 1o quelles parties de l’encéphale sont le siège de la conscience, et dans quelle mesure ; 2o quelle relation unit le développement de l’intelligence et celui du cerveau. Un court appendice sur tes phénomènes physico-chimiques de l’activité cérébrale (augmentation de température [Schiff, Lombard], variations électriques, phénomènes chimiques) clôt cette partie physiologique, si nécessaire, mais où l’auteur montre peut-être un peu trop de confiance en des théories que Lewes, on le sait, a critiquées (p. 141-202).

M. Sergi aborde alors l’important problème de la formation et de l’organisation des idées. Notre but n’est pas de discuter ici ses doctrines, ni même de les exposer en détail. Nous nous bornons à en signaler la tendance générale. Il nous suffira donc de dire que les longs développements donnés par l’auteur à cette question ont pour but d’établir une sorte de nominalisme raffiné. De l’image sensitive, tout concret suscité dans l’esprit par chaque objet particulier, nous détachons un petit nombre d’éléments communs à tous les individus, et ces éléments liés au signe, au nom forment l’idée. Généraliser, c’est donc opérer une abstraction, réaliser une analyse. Le résidu ainsi obtenu ne ressemble plus à l’objet. Il est le produit d’une activité mentale spontanée, qui ne peut s’exercer