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Dr g. le bon. — la question des criminels.

pathologiques considérables, permettant de considérer son possesseur comme un aliéné arrivé déjà à une période de maladie fort avancée. Voici du reste comment sont décrites ces lésions par le savant préparateur du laboratoire d’anthropologie, M. Chudzinski ; « Le lobe frontal, des deux côtés symétriquement, est atteint d’un ramollissement cérébral des plus prononcés, ainsi que la première et la deuxième circonvolution pariétale. La première et la deuxième circonvolution temporale sont également ramollies, mais à un moindre degré. Le lobe occipital des deux côtés offre des traces de ramollissement. Le cerveau est, en somme, tellement ramolli qu’on aura de la difficulté pour le mouler. L’arachnoïde et la pie-mère sont très résistantes et très épaissies, comme chez les quadrupèdes. Le premier pli de passage occipito-pariétal est profond et a tendance à la calotte à droite ; il est normal à gauche. »

Quant aux crânes de trente-cinq guillotinés du muséum de Caen, ils ont fourni au docteur Bordier des résultats analogues. La presque totalité (92 0/0) étaient anormaux ou pathologiques, 21 0/0 présentaient des lésions osseuses consécutives à des lésions des enveloppes cérébrales impliquant elles-mêmes de graves altérations du cerveau. Parmi les anomalies ou altérations notées par lui se trouvent surtout les suivantes développement considérable des arcades sourcilières ; faible développement de la région frontale, mais développement considérable des réglons pariétales et occipitales et par conséquent de la capacité cranienne elle-même, lésions fréquentes des sutures. Je compléterai un jour ces indications au point de vue des modifications de forme, lorsque j’aurai eu le temps d’étudier les dessins géométriques que j’ai pris de cette série, et qui figurent dans ma collection déjà nombreuse de dessins craniologiques.

Ces recherches récentes ne font que confirmer, je le répète, ce

    il assisterait à un grand et terrible spectacle ; il pourrait rendre à cette tête ses fonctions cérébrales ; il pourrait réveiller dans les yeux et les muscles faciaux les mouvements qui chez l’homme sont provoqués par les passions et les pensées dont le cerveau est le foyer. »

    Cette expérience, qui permet de rendre à volonté à un cadavre — simplement en manœuvrant un robinet cette chose si immatérielle en apparence, nommée l’âme par les spiritualistes, sera assurément fort curieuse. Rien ne serait plus facile que d’établir par des signes conventionnels une conversation suivie avec cette tête coupée. L’expérience pourra évidemment se prolonger des jours et des mois, puisqu’il suffirait d’entretenir une circulation régulière de sang dans les vaisseaux du cerveau en les mettant en communication continue avec ceux d’un animal, sur le corps duquel on pourrait peut-être même arriver à greffer la tête. On varierait d’une façon intéressante l’expérience en ralentissant ou accélérant la circulation, en ajoutant au sang diverses substances excitantes, comme le thé, l’alcool, etc., qui pourraient modifier comme chez le vivant le mode de fonctionnement des cellules cérébrales, etc.