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sensation et me rappelle l’image et toute, une série d’images. Il agit d’une manière centripète ou centrifuge, suivant que nous écoutons ou que nous parlons ; enfin les sons et les mots se ravivent dans la mémoire, comme les autres sensations et mouvements.

Chaque espèce de sensation a sa marque caractéristique. C’est même pour cette raison qu’on peut parler d’espèces de sensations. Parmi ces marques, l’une des plus significatives est la localisation. La localisation est non primitive, mais acquise. L’observation de l’enfant ne doit laisser aucun doute à cet égard ; et, s’il subsistait des doutes, les expériences de Volkmann suffiraient pour les lever. Ce savant a montré que l’exercice développait rapidement et considérablement la faculté localisatrice. Sur la peau d’un bras non exercé, les deux pointes d’un compas, distantes de plus d’un centimètre, pourront d’abord ne fournir qu’une sensation unique. Mais cette sensation ne tardera pas à devenir double, et, pour reproduire la même illusion, il faudra rapprocher les pointes., Remarque à noter : le bras qui n’aura pas été soumis à l’expérience acquerra, à peu de chose près, le même degré de subtilité que l’autre. De tous nos organes, c’est l’œil qui a la faculté de localisation la plus puissante. Un attouchement non senti le devient dès qu’il est vu. C’est parce que nous ne voyons pas nos organes internes que nous ne pouvons localiser leurs affections. C’est le cas pour les désirs et les émotions que nous détachons comme subjectifs du monde objectif.

À cette occasion, Lewes dit quelques mots de la loi de Fechner. Ce sujet peut être suffisamment connu des lecteurs de cette Revue, où il en a été question plusieurs fois. Je passe.

Le chapitre qui suit est particulièrement intéressant. Lewes se demande s’il y a des organes de la sensation, de la pensée, de la volition, comme il y en a de la vue, de l’ouïe, etc. Non, répond-il, il n’y a que des combinaisons de procès organiques., Pourquoi diviser le système nerveux et assigner au cerveau une place à part ; comme siège de la pensée et de la volition ? Le cerveau est une partie déterminée d’un tout continu. Il a des fonctions spéciales, mais non des propriétés spéciales. La main a d’autres offices, que les pieds, mais elle a les mêmes propriétés que les pieds. La centralisation est dans le système nerveux tout entier, dont les ajustements sont dirigés et combinés par le système, musculaire.. La réaction de la partie n’est possible que par la réaction du tout. La sensation n’est qu’un mode particulier du sentir. Les sensations internes ont la même signification psychique que les sensations externes, c’est-à-dire obtenues par l’intermédiaire des organes des sens. La muqueuse nasale ou buccale est dite un appareil sensoriel, parce qu’elle répond à