Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 11.djvu/330

Cette page n’a pas encore été corrigée
326
revue philosophique

rement qualifiée dans notre analyse précitée. Nous ne voulons pas répéter ce jugement, d’autant que nous apprécions peut-être plus favorablement aujourd’hui les thèses que déguisent ces allégories, sous prétexte de les mieux faire saisir.

Nos lecteurs comprendront mieux l’idée fondamentale de l’ouvrage d’après ce schéma, emprunté à la page 85 :


Être (pur) éléatique
(sans opposition ; ni unité ni pluralité ne lui appartiennent).

Être subjectif (= volonté) Être objectif
(à quoi appartiennent, dans sa relation à l’être objectif, les formes de l’espace, du temps, de la causalité, qui font paraître comme force la volonté objective).
(est inconnu en soi ; mais doit, comme nécessairement identique d’essence avec l’être subjectif, être volonté ; apparaît comme force au sujet connaissant).

Ainsi nous sommes en présence d’un système nettement idéaliste, niant résolument le dualisme, et ce qui est une tendance de notre siècle, faisant dominer le concept de volonté.

Y a-t-il là une base suffisante pour une nouvelle métaphysique ? Nous le pensons ; peut-être, précisément parce que la volonté est un chose plus obscure que la représentation, a-t-on plus de chance de transformer de la sorte la conception de Leibnitz, ce qui me paraît être le résultat obtenu par M. Bilharz ; je ne dis pas le but cherché, car notre auteur, qui dénie toute originalité à l’inventeur des monades, ne sera sans doute pas flatté de ce jugement. Mais, tout au contraire de lui, je crois, avec Teichmüller, que Leibnitz est le seul penseur qui ait introduit depuis l’antiquité une idée vraiment neuve en métaphysique, quand il a donné une forme, si imparfaite fût-elle, à l’affirmation de l’individualité ; or c’est là le point où il me semble que M. Bilharz peut être en progrès sur Schopenhauer.

Resterait à savoir si, sur cette base suffisante, a été élevé un édifice solide et bien conçu ; si la transformation indiquée a été heureusement accomplie. Ici, nous ne discuterons pas les questions de fond, approuvant ceci, rejetant cela ; mais nous croyons pouvoir dire que comme forme, et pour s’imposer à l’attention du public compétent, l’œuvre aurait besoin d’être profondément remaniée.

À cet égard, en dehors d’un point déjà indiqué, nous ne pouvons approuver l’emploi de formules mathématiques détournées de leur signification technique. « Il nous est connu, dit M. Bilharz (p. 84), que nous pouvons avec une précision et une détermination conformes à la raison définir aussi d’une autre manière le concept de force (comme vitesse), à savoir comme le chemin parcouru dans l’unité de temps :

,