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ANALYSESbilharz. — Der heliocentrische Standpunkt.

Tout d’abord, l’ouvrage le premier en date a une grande supériorité sur le second, juxtaposition mal liée d’un aperçu de métaphysique et d’un traité de mathématiques dus à des plumes différentes. Ici au moins nous sommes en présence d’un travail suffisamment développé pour que l’on puisse apprécier les réelles qualités philosophiques de l’auteur.

Mais nous ne pouvons non plus nous dissimuler les défauts de sa méthode d’exposition ; il exige trop du lecteur. Il faut que celui-ci, sur des données plus ou moins précises, refasse tout le travail intellectuel nécessaire pour passer des prémisses aux conclusions. C’est du premier coup vouloir des disciples et rebuter la simple curiosité. Aussi ne conseillerions-nous l’étude de ce livre qu’à ceux-là seulement qui se sentent vraiment la tête métaphysique ; mais nous pensons qu’elle peut leur être profitable, ne fût-ce que comme exercice.

L’ouvrage comprend trois parties la première est une introduction de critique historique (p. 1-66) ; la seconde établit les thèses fondamentales (p. 67-140) ; la troisième déduit les conséquences pour le monde de l’expérience tant extérieure qu’intérieure (p. 141-242). Le reste du volume est consacré à des notes et des éclaircissements.

La première partie ne nous arrêtera pas ; quelle que soit sa valeur, nous pensons que M. Bilharz eût bien fait de la remplacer par une série dogmatique des définitions des termes qu’il emploie et des propositions qu’il considère comme établies. Nous sommes à la vérité très contents aujourd’hui qu’Aristote ait commencé sa Métaphysique en comparant et discutant les opinions de ses précurseurs ; mais ce n’est point qu’ainsi son œuvre ait gagné en clarté, c’est seulement qu’il nous fournit de précieux renseignements sur des philosophes dont les écrits sont perdus. Nous voulons espérer que ceux de Kant et de Schopenhauer ne périront pas de sitôt.

It est déjà assez difficile de s’assimiler, par l’étude approfondie d’un penseur original, les concepts métaphysiques qu’il développe ; si vous me renvoyez, pour les éléments de votre système, à deux ou trois philosophes qui certainement n’ont pas donné aux mêmes mots exactement le même sens, vous ne faites que créer la confusion dans mon esprit. Si vous admettez d’ailleurs que je les connais, êtes-vous sûr que leurs concepts soient pour moi les mêmes que pour vous ? Mieux vaut donc faire table rase et procéder comme Descartes. Peut-être a-t-il tout pris à Aristote, même son fameux : Je pense, donc je suis[1]. En tout cas, nous n’avons pas besoin de le savoir.

En arrivant à la seconde partie du livre de M. Bilharz, nous nous trouvons en présence de cette terminologie figurée (points de vue géocentrique, périgéique, héliocentrique, etc.), que nous avons déjà sévè-

  1. Éthique à Nicomaque, IX, 9, 9, Τὸ γὰρ εἶναι ἦν αἰσθανεῖσθαι ἢ νοεῖν. On sait que Descartes a déclaré que quand il disait : Je pense, il entendait également : Je sens.