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h. spencer. — des formes et des forces politiques.

donne par suite aux deux éléments supérieurs de l’appareil politique la force de se débarraser du troisième. Ou bien encore les membres du troisième, conservant des habitudes qui rendent difficile ou impossible l’emploi de la contrainte à leur égard, peuvent conserver sur les deux autres une suprématie générale. Enfin les rapports de ces trois éléments gouvernants avec la société dans son entier peuvent subir, et ordinairement subissent des changements par suite de la formation d’une classe passive, exclue de leurs délibérations, classe d’abord composée de femmes, auxquelles viennent plus tard s’ajouter les esclaves et les autres individus tenus en dépendance.

Les guerres heureuses n’ont pas seulement pour résultat de fonder la classe passive ou non politique, mais de changer plus ou moins nettement, grâce à la subordination qu’elles supposent, les forces relatives des trois parties de l’appareil politique. Comme, toutes choses restant égales, les groupes dans lesquels la subordination est faible ou nulle sont subjugués par les groupes dans lesquels la subordination est plus grande, il y a des chances pour la survie et l’extension des groupes dans lesquels la force politique du petit nombre des dominateurs devient relativement grande. Pareillement, puisque le succès à la guerre dépend grandement de la promptitude et de la consistance de l’action que donne l’unité de volonté, il faut nécessairement, lorsque l’état de guerre est persistant, que les membres du groupe gouvernant obéissent de plus en plus à son chef ; en effet, dans la lutte pour l’existence entre des tribus d’ailleurs égales, la destruction est la conséquence ordinaire d’une obéissance insuffisante. Il faut remarquer encore que l’assujettissement des sociétés les unes par les autres, souvent renouvelé, a pour effet d’obscurcir et même d’effacer les traces de la forme politique originelle.

Seulement, tandis que nous reconnaissons que durant le cours de l’évolution politique ces trois éléments primitifs changent de proportions de diverses manières et à des degrés divers, au point que certains tombent à l’état de vestige ou même disparaissent entièrement, il est un fait qui modifiera profondément nos idées sur les formes politiques c’est qu’elles dérivent toutes de cette forme primitive. Il faut considérer une monarchie despotique, une oligarchie, ou une démocratie comme un type de gouvernement où l’un des éléments originels s’est considérablement développé aux dépens des deux autres ; et il faut classer les divers types mixtes d’après le degré d’influence que l’un ou l’autre des éléments originels y conservent.

Y a-t-il quelque unité fondamentale de forces politiques qui accompagne cette unité de formes politiques ? En perdant de vue l’origine