toutes les formes d’art qu’elle a adoptées. Il y a vraiment un style architectural qui est purement vénitien, et c’est là un phénomène rare dans l’histoire de l’art. Tandis qu’au XVe siècle toute l’Italie se fait florentine, de même qu’elle sera toute romaine pendant les trois siècles suivants, on peut dire que Venise reste toujours vénitienne. Alors que l’on aura souvent de la peine à distinguer un palais florentin d’un palais romain ou napolitain, une œuvre vénitienne se reconnaîtra toujours au premier coup d’œil. Il y a plus d’analogies entre deux palais vénitiens séparés par sept siècles d’histoire, entre le palais Lorédan du xie siècle par exemple et le Rezzonico du xviie siècle, qu’il n’y en a entre deux palais construits à la même époque sur la lagune ou sur les rives de l’Arno, entre la Cà d’Oro et le Palais Vieux qui datent tous deux du xive siècle, ou entre le palais Vendramini et le Strozzi du xve siècle.
De quoi est fait ce style vénitien ? Avant tout de sa légèreté et de sa richesse : la légèreté est due à une habitude séculaire de la sécurité. Alors que partout au monde la maison noble fut toujours une maison forte et que, tout particulièrement en Italie, elle dut garder très tardivement ce caractère, à Venise, c’est l’agrément que l’on cherche et non la défense. Le nombre et la dimension des ouvertures sont anormaux en Italie, pays du Midi, où la crainte de la chaleur fait du soleil l’ennemi, et conseille au contraire les murs épais et les ouvertures rares. Pour trouver des fenêtres analogues à celles de Venise, il faut aller dans les pays du Nord, avides de lumière, en Hollande