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BRAMANTE.

grande place à côté de celui de Bramante. Et ces deux grands génies furent très différents l’un avec l’autre. Michel-Ange est le chef d’une école qui, tout en semblant d’abord prendre la suite de celle de Bramante, fut au contraire en opposition profonde avec elle. Bramante c’était la Renaissance, Michel-Ange ce sera le Baroque ; Bramante c’est l’équilibre, la sagesse, l’harmonie, la distinction, le culte de la forme, Michel-Ange c’est la recherche expressive, c’est le sacrifice du détail à l’effet d’ensemble, Michel-Ange c’est l’homme qui veut exprimer puissamment ses pensées, sans souci des incorrections nécessaires pour atteindre à son but. Certes, comme Bramante, Michel-Ange connaît l’architecture antique et il l’aime passionnément, et par là il est au premier rang des chefs de la Renaissance, mais, tout en se servant de l’art antique, il n’hésite pas à s’affranchir de ses règles trop étroites, à déformer, on peut même dire à torturer ses formes, pour les rendre plus expressives.

L’architecture créée par Michel-Ange n’est pas immuable et impersonnelle, mais vivante et toute faite de sensibilité. Elle sera apte à se transformer du tout au tout selon les pensées par lesquelles sera dominé son auteur.

Dans sa longue vie artistique Michel-Ange a vu bien des changements survenir autour de lui. À Florence, après les triomphes et la richesse, il assiste aux désastres et à la ruine provoqués par les révolutions et l’invasion des armées étrangères. À Rome, il voit se succéder neuf papes sur le trône pontifical, et, après avoir connu le faste et le luxe de