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BRAMANTE

l’adoption des ordres antiques, c’était la difficulté de les employer dans les édifices chrétiens. Comment en effet disposer dans les églises gothiques des entablements qui en auraient interrompu toutes les lignes ascensionnelles ? Comment parvenir à substituer des colonnes classiques aux longues colonnettes fuselées s’élançant du sol jusqu’au faîte pour aller rejoindre les nervures des hautes voûtes ? L’emploi des ordres allait inévitablement nécessiter une modification notable dans les formes générales de l’architecture. Or ces formes s’étaient créées progressivement, par une lente élaboration, elles étaient le fruit du travail continu et de la pensée de nombreuses générations, elles correspondaient aux besoins et aux désirs de leur époque et elles ne pouvaient être changées que si l’esprit qui les avait créées se modifiait lui-même, et ce ne fut pas l’œuvre du xve siècle.

Depuis Brunelleschi, jusqu’à l’apparition de Bramante, les architectes conservèrent dans son ensemble l’architecture traditionnelle du moyen âge ; ils se contentèrent, par des artifices plus ou moins habiles, d’y introduire quelques éléments antiques en les pliant aux exigences des constructions dont ils ne voulaient pas changer les lignes essentielles.

L’architecture ne fut réellement et profondément modifiée que lorsque l’esprit qui la dirigeait fut lui aussi transformé, et ce fut le dernier terme qui marqua l’achèvement de l’œuvre de la Renaissance. Cette évolution ne s’accomplit qu’au xvie siècle ; elle caractérise la période dont