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L’ANALYSE DES DOCTRINES.

guliers comme les expériences de Joule et de Mayer, et dont l’expérience permet ensuite l’extension à toutes les branches de la physique, parce que le réel répète en quelque sorte indéfiniment cette première singularité, et non parce qu’il est constitué par une qualité substantielle générale. La notion d’énergie est une abstraction tirée des expériences réelles ; c’est la représentation d’un élément qui se répète dans toute réalité physique, mais ce n’est pas une entité, une qualité substantialisée. La théorie conceptuelle de la physique ne rappelle en rien la philosophie du concept. L’usage que Rankine fait du concept, usage symbolique, est aux antipodes de l’usage qu’en faisait la scolastique. La théorie physique n’est pas un ordre rationnel transcendant aux apparences sensibles : c’est un ordre rationnel, certes, mais auquel l’expérience sensible est immanente.

Le rationnel garde bien son sens cartésien ; il reste le monde des idées claires et distinctes, de la grandeur, de la méthode mathématique, justiciable des principes de la mathématique. Ce n’est pas le monde des généralités vides, de la qualité, de la méthode syllogistique, justiciable des seuls principes de la logique formelle. La théorie physique suit les conditions de l’expérience, et son ordonnance logique se confond avec l’ordonnance de la nature ; l’une ne peut exister sans l’autre ; elles sont fonction l’une de l’autre.