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LA CRITIQUE DU MÉCANISME : L’ATTITUDE HOSTILE.

il propose de l’abandonner. Il est en cela le fidèle continuateur de Newton qui a toujours rêvé d’une physique pure transcription de l’expérience ; il obéit aussi sans doute aux traditions empiriques de l’esprit anglais.

3. — Mais que devient la pliysique théorique, ainsi dépouillée de toute objectivité, en dehors de celle que possèdent les résultats expérimentaux qu’elle transcrit ? Pourquoi ne pas simplement considérer la physique comme un recueil de règles empiriques ? La physique théorique n’est-elle pas une superfétation ? Rien ne serait plus loin de la pensée de Rankine, et ce qu’il dit de la mécanique rationnelle, qui n’est pour lui qu’une théorie physique, la théorie définitive, idéale, d’un groupe de phénomènes physiques, montre clairement l’importance qu’il attache, à côté de la physique expérimentale, à la physique théorique. La forme théorique est la forme aclievée de la science, l’idéal qu’elle poursuit. Une mathématique de l’univers physique, rigoureusement déduite, voilà bien la conception que ce novateur emprunte à Descartes et à la physique de la Renaissance. Seulement, il veut que cette mathématique soit rigoureuse, ne fasse pas intervenir des conjectures invérifiables. Il ne conçoit toute mathématique que comme un enchaînement logique d’abstractions tirées des faits.

Quelle valeur possède alors cette mathématique de la physique ? Elle possède précisément la valeur qui appartient à des abstractions et à des relations tirées des faits. La théorie physique a une valeur représentative. Elle est la représentation des liaisons imposées par l’expérience entre les groupes de phénomènes rassemblés selon les analogies de l’expérience. Elle est la représentation des phénomènes physiques à laquelle l’expérience nous amène au fur et à mesure de la découverle, invinciblement, nécessairement, universellement. La théorie physique n’est pas arbitraire ni inutile. Représentant le système des choses de l’expérience, elle est une classification descriptive naturelle de ces choses.

À quoi bon cette classification ? D’abord à nous représenter méthodiquement l’expérience si complexe et si cou-