2o Dans une science abstraite, les premières propositions que l’on a découvertes, sont les plus simples de toutes et elles sont en nombre très restreint ; elles constituent les principes fondamentaux de cette science[1]. On cherche ensuite de proche en proche à composer tout le reste avec ces notions simples, et à n’ajouter d’éléments nouveaux que lorsque c’est absolument nécessaire.
D’après Rankine, la science de la matière nous présenterait un tout autre aspect. Ici, les propositions d’abord découvertes sont en général complexes et forment un ensemble confus et chaotique : elles s’accumulent en très grand nombre, sans qu’on puisse voir de liens bien nets entre elles. On arrive aux axiomes premiers beaucoup plus tard, et l’on suit dans le développement de la science, une marche opposée à celle que l’on suit dans la science abstraite ; elle est inductive au lieu d’être déductive. L’induction s’oppose à la déduction, d’un côté, parce qu’elle est plus complexe et d’application plus difficile ; de l’autre, parce qu’elle est une tentative de généralisation[2].
Ce dernier point mérite, dans l’œuvre de Rankine, une attention spéciale : il est le point central de sa critique du mécanisme.
Cette remarque : « Le procédé inductif est toujours une tentative de généralisation », signifie, en effet, qu’il enveloppe toujours des principes conjecturaux, et leur acceptation ou leur rejet, selon que leurs conséquences coïncident ou non avec les lois qui dérivent de l’observation[3].
Dans le domaine de la physique, nous avons donc à distinguer deux étapes nécessaires. Dans la première, on établit des formules, tirées directement de l’expérience. Dans la seconde, on enchaîne ces formules en une théorie générale, de façon que la physique prenne l’aspect d’une science abstraite[4]. La physique expérimentale se transforme en physique théorique, par la découverte du système
