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LE MÉCANISME TRADITIONNEL.

effet, accepté cette théorie. Mais il est aisé de remarquer aussi qu’une fois établie une formule mathématique simple, capable de représenter toujours d’une façon nécessaire et identique les transformations d’énergie mécanique en énergie thermique, certains esprits, mathématiciens de race, qui se meuvent aisément dans les notions abstraites, mais qui répugnent aux images concrètes, devaient considérer comme inutile l’hypothèse d’une image concrète. Pourquoi aller chercher des mouvements invisibles, des masses cachées, des liaisons arbitraires, alors que la foririule mathématique suffit à tous les besoins de la science ?

Lorsque, par une généralisation qui s’imposait, la loi expérimentale de l’équivalence de travail et de la chaleur fut transformée en principe général de l’équivalence de toutes les formes de l’énergie, c’est-à-dire devint le principe de la conservation de l’énergie, cette tendance à se départir du mécanisme traditionnel ne pouvait que s’accentuer. Pourquoi doubler cette formule d’une intelligibilité si claire, par des constructions compliquées, et représenter toutes les formes de l’énergie par l’énergie mécanique, c’est-à-dire par un ensemble de situations et de vitesses initiales ? Certaines formes de l’énergie, comme l’énergie électrique, ne hérissaient-elles pas de difficultés les chemins que l’on essayait de tracer pour établir ces correspondances ? Pourquoi vouloir ramener à la forme spéciale d’un cas particulier une loi qui paraissait être universelle, et pourquoi s’acharner à dériver de ce cas particulier toute la physique, alors qu’on avait une formule générale d’où l’on pouvait au contraire très facilement déduire à son tour ce cas particulier ?

Certains donc trouvèrent plus simple de renoncer à la mécanique classique pour asseoir l’édifice de la physique, et de considérer la mécanique classique elle-même comme une aile de l’édifice, comme une particularisation d’un système plus général, particularisation qui se bornait à considérer l’énergie de position et de mouvement. L’édifice tout entier serait plus harmonieux, plus simple, plus logique, plus intelligible, s’il se fondait sur la notion d’énergie, au