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CONSÉQUENCES PHILOSOPHIQUES.

a désigné l’ensemble de ces vues, la synthèse de ses tendances, la famille d’esprits qu’elles déterminent, par un même terme : le positivisme, en donnant à ce terme un sens infiniment plus large que celui qu’il possède lorsqu’on le restreint au système de Comte et à sa stricte observance.

Issu certainement de celui de Comte, de Taine et de Mill, issu aussi de Spencer, mais rajeuni, ce positivisme nouveau[1] garde de son état antérieur deux grandes idées directrices : le relativisme et l’empirisme de nos connaissances ; mais il précise, au point d’en faire presque une idée nouvelle, l’idée de ces catégories expérimentales que la science revendique comme un besoin actuel.

Elles paraissent renouveler le positivisme en formulant une théorie de la connaissance plus étudiée, en édifiant sur les critiques du rationalisme tel qu’il se présentait traditionnellement dans la seconde moitié du xixe siècle, un rationalisme nouveau. De même le cartésianisme ou le criticisme, avaient substitué au rationalisme routinier, ruiné par les attaques des sceptiques, un nouveau rationalisme.

2. — On peut dire que la critique sceptique contemporaine de la science est historiquement, elle aussi, sortie du positivisme comtien, mais en lui tournant le dos. Il n’y a rien là de surprenant puisque le système nouveau qui doit condenser les aspirations de la science d’une époque, fait siennes les critiques qui ont ruiné la conception antérieure et s’appuie sur elles. Seulement, si le point de départ est commun, le point d’arrivée est tout à fait opposé. La critique sceptique n’a fait qu’emprunter au positivisme des arguments de détail, mais les a utilisés dans un esprit général tout à fait différent. Elle les a poussés à l’extrême — ou à l’absurde, selon les opinions personnelles, — par une logique spécieuse. Elle les a détournés de leur véritable sens. Au contraire, la doctrine qui s’esquisse pour représenter l’esprit de la science contemporaine, a surtout emprunté au positivisme son esprit philosophique, ses ten-

  1. Je crois donner à ce terme son véritable sens historique et critique, bien qu’on l’ait employé indûment pour désigner une tout autre doctrine — de même que le terme « nominalisme ».