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LA VALEUR DE LA PHYSIQUE.

sciences, depuis lequel elle a arrêté en gros ses méthodes, elle ne se prête guère à des divergences théoriques sensibles.

Tout autres nous apparaissent les sciences physico-chimiques. L’objet y est extrêmement compliqué en comparaison de celui des sciences mathémathiques. Et plus elles progressent, et plus augmente la complication, car des phénomènes, des ensembles très vastes de phénomènes, jusque-là insoupçonnés, s’y révèlent à chaque instant. On ne l’étudie que depuis trois siècles d’une façon méthodique et par des procédés adaptés à son objet et qui ont fait leurs preuves. Partout l’inconnu ou le très imparfaitement connu débordent ce qui l’est à peu près et rendent hésitant sur le caractère définitif de ces maigres connaissances. Ces raisons ont concouru à donner à la physique l’aspect qu’elle a gardé jusqu’à nos jours. Elle ne pouvait pas nous présenter, malgré l’unité de son devenir, autre chose que ces divergences, les théories se substituant les unes aux autres, tout en se corrigeant et en se complétant les unes les autres. La physionomie actuelle de la physique n’est donc pas celle qu’elle présentera toujours. Tout porte à penser, au contraire, qu’elle n’est due qu’à des contingences relativement transitoires (bien que ce transitoire puisse durer des siècles, et que rien encore ne fasse prévoir sa fin imminente). Les divergences, les oppositions mêmes que l’on remarque entre les théories physiques iront donc en s’atténuant, à mesure que la physique progressera ; et elles sont allées en s’atténuant à mesure que la physique a progressé. Elles ne tiennent pas à la nature de la physique ; elles tiennent à la phase initiale de son développement.

5. — Aussi, dès qu’on lit les réflexions d’un physicien, quel qu’il soit, sur la physique, ne le voit-on jamais émettre le moindre doute sur l’unité profonde de sa science et sur l’accord final des théories, au moins dans leurs lignes générales. Tous sous-entendent que les divergences ne sont que temporaires. Ce sont des divergences sur des moyens accessoires que le savant emploie pour atteindre les résultats qu’il vise. Mais ces moyens accessoires, nécessités par l’in-