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CONSÉQUENCES PHILOSOPHIQUES.

contraire, la méthode scientifique, seule, possède cette valeur de savoir ; et les autres méthodes n’ont qu’une valeur pratique ou morale.

6. — De l’avis de tous les physiciens contemporains, la science physique se présente donc comme un ensemble de relations nécessaires, de résultats que l’expérience impose universellement et qui seront invariablement les mêmes dans les limites de la précision des instruments d’expérience, pour tous les savants qui s’astreindront à opérer dans les mêmes conditions. Cet ensemble de relations nécessaires constitue la valeur des sciences physico-chimiques, leurs résultats réels : ce sont elles qui nous permettent de dominer la nature, d’agir effectivement sur elle et qui fondent la valeur pratique de la science.

À l’inverse des propositions sceptiques, il semble donc légitime de dire que la valeur pratique de la science dérive de sa valeur théorique. Sa valeur d’utilisation n’existe que par sa valeur de connaissance. L’une et l’autre sont les deux faces inséparables et rigoureusement parallèles de sa valeur objective. Dire qu’une loi de la nature a une valeur pratique, dire qu’elle est commode pour représenter les données de l’expérience, les repérer ou permettre de les utiliser, revient à dire au fond que cette loi de la nature a une objectivité, qu’elle comprend des éléments issus du réel et convenableblement représentatifs de l’objet.

Lorsqu’une philosophie considère qu’il n’y a pas de différences entre des propositions qui permettent la même action sur la nature, au lieu de déduire de là qu’il n’y a pas de connaissance théorétique, qu’il n’y a pas de distinction objective entre le vrai et le faux, elle semblerait bien plus logique en établissant des conclusions inverses. Agir sur l’objet implique une modification de l’objet, une réaction de l’objet conformes à une attente ou à une prévision contenue dans la proposition en vertu de laquelle on agit sur l’objet. Celle-ci enferme donc des éléments contrôlés par l’objet, et par l’action qu’il subit. Elle admet une conformité avec le donné empirique, conçu comme nécessaire. Il y a donc dans ces théories diverses une part d’objectif. La science a