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DÉLIMITATION DU PROBLÈME

excepté à l’époque de la Renaissance, où d’ailleurs la discussion se borna à la critique de la scolastique et fut faite plutôt du point de vue de la science en général que du point de vue particulier des sciences physico-chimiques : ils revendiquèrent surtout la liberté des recherches scientifiques, le libre examen, contre le principe d’autorité. Nous sommes, je crois, tout à fait au début de la période qui permettra de constituer la technique de la physique, au début de la période de la critique particulière, spéciale, d’une pratique restée jusque-là assez vague et empirique. Ceci explique l’attention qui brusquement s’est portée sur les sciences physiques ; elle fut attirée par des dissensions qui paraissent profondes et réelles sur la conception générale que les savants eux-mêmes se font de ces sciences. Ceci explique encore les conclusions sceptiques que l’on s’est cru autorisé à en tirer, que l’on s’est empressé d’en tirer, et ce qu’on peut appeler la crise de la physique contemporaine.

En résumé, la logique des sciences a essentiellement pour buts de préciser les méthodes scientifiques, afin d’établir un contrôle rigoureux sur leurs résultats, et aussi en vulgarisant ces méthodes, d’éduquer l’esprit d’une façon scientifique, car ce n’est pas au savant rompu à la pratique des méthodes, ou créateur des méthodes, qu’une logique des sciences est destinée ; c’est à ceux qui n’ont point cette éducation spéciale, et pour les faire participer à ses avantages.

Peut-être dira-t-on que cette tâche n’est pas très utile, puisqu’elle n’est en quelque sorte qu’une étude de seconde main. Pourquoi ne pas abandonner complètement la logique des sciences, et laisser la parole aux savants, uniquement aux savants, et à leurs œuvres, qui sont, elles, des œuvres de première main ? N’est-ce pas les doubler bien vainement ? L’argument est spécieux. Pourtant, si la logique des sciences est l’œuvre des savants, encore faut-il la dégager de l’œuvre des savants. Ceux-ci sont loin d’être toujours d’accord, et dans ces dernières années, la critique n’a guère fait que constater, en les exagérant, leurs divergences. Peut-être eût-il été plus fécond de chercher en quoi