vide et des atomes, qu’on adopte l’hypothèse des tourbillons dans un fluide primitivement homogène, ou les chocs de petites masses dans le vide, dans tous les cas, le mécanicien ou le physicien croit par son hypothèse s’élever à des principes qui sont les conditions nécessaires et suffisantes de l’univers physique. Les limites de la physique sont les limites de la nature.
Il est aisé de voir la liaison intime de cette solution dogmatique de la valeur de la science physique avec le dogmatisme des théories métaphysiques de la connaissance en général. Sur quoi repose cette conception de l’adéquation de la science à la réalité, sinon sur la conception de l’idée adéquate et de l’intuition intellectuelle ?
3. — Les savants ne s’en doutent guère : tous ils croient être observateurs et expérimentateurs scrupuleux. Le mécaniste traditionnel de la première moitié du xixe siècle, les disciples qu’il peut encore avoir aujourd’hui auraient énergiquement protesté si on les avait traités de métaphysiciens, et si on leur avait parlé d’intellect intuitif. Ils croient être les fidèles interprètes de l’expérience ; ils ne croient être que cela. Et pourtant… Il faudra tout l’effort de la critique du xviiie siècle, de Kant et de Comte pour montrer que l’empirisme conduit nécessairement au relativisme.
Lorsqu’ils formulaient leurs hypothèses, les physiciens traditionnellement mécanistes parlaient de l’expérience, ils s’imaginaient ne jamais la dépasser. Faisaient-ils rien autre que remonter des conséquences aux principes, qu’analyser la réalité expérimentalement donnée ? Arrivant ainsi aux tourbillons ou aux atomes, aux principes de Galilée ou de Newton, aux forces centrales, pourquoi auraient-ils cru qu’ils sortaient du domaine de l’expérience ? Une fois là, il leur semblait tenir les fils mêmes qui faisaient naître, mouvoir et disparaître les phénomènes. Comme ils étaient partis de l’intuition empirique, ils croyaient n’être pas sortis de son domaine. Et leur certitude, leur dogmatisme leur semblaient assis sur l’expérience. En réalité, l’intuition empirique s’était tout simplement changée en intuition intellectuelle. C’est dans leur esprit, à la lumière de la
