Page:Rey - La théorie de la physique chez les physiciens contemporains, 1907.djvu/339

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
317
LA VALEUR DE LA PHYSIQUE.

au point de vue subjectif le plus absolu, il me semble que j*ai le droit de dire : Toutes nos connaissances, et par suite tous nos états de conscience sont du même ordre. Si les unes sont objectives, les autres le sont aussi. Si des expériences, celles du rêve, sont réelles, les autres, celles du laboratoire, le sont également ; car je ne puis voir de différence de nature entre elles. Et les différences de degré sont tout en faveur des dernières.

Je crois qu’on peut, à propos de l’objectivité de la physique, conclure d’une façon tout à fait générale sur le problème de la valeur de la connaissance scientifique, baissons de côté le point de vue subjectif comme le point de vue objectif. Ils résultent peut-être tous deux d’une analyse partielle. Plaçons-nous dans la réalité commune. Dire qu’une chose est fixe, dire qu’elle est nécessaire, c’est dire qu’elle a telles et telles relations avec d’autres choses. La perception me donne en gros et d’une façon confuse les relations entre les choses. Les rendre plus précises, plus détaillées, plus complètes, voilà la tâche de la science. Elle augmente par là la nécessité et la fixité de ces relations, c’est-à-dire ce qui fait leur objectivité.

Par suite, quelle que soit l’école à laquelle appartient le physicien, comme il demande toujours à la théorie physique la coïncidence de ses conséquences avec l’expérience, c’est-à-dire l’identité des relations qu’elle permet de déduire avec les relations de nos représentations, toute théorie physique (et la science physique tout entière) a une valeur objective. Au fur et à mesure de ses progrès, cette objectivité augmente, dépasse, par la fixité, la précision et la nécessité des relations auxquelles elle aboutit, l’objectivité de ses résultats antérieurs, et par conséquent l’objectivité de la perception qui fut le point de départ. La perception, et déjà l’affection confuse de plaisir ou’de douleur, étaient une physique inconsciente : c’était le commencement dans l’espèce humaine de la physique proprement dite. Notre perception n’est qu’un instinct spécifique qui porte les marques de la supériorité psychologique de l’espèce. Notre science Ta prolongée.