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LA VALEUR DE LA PHYSIQUE.

elles sont des signes et un langage. Il est trop évident qu’un degré ou qu’une calorie n’existent pas objectivement, pas plus que les signes qui les désignent dans les calculs, ou les mots qu’on emploie pour en parler. Ce qui existe objectivement, ce qui est immuable et fixe, c’est le résultat auquel on arrive si l’on convient d’user de tels signes, de tels mots, de telles notatfons. Voilà la limite qu’impose la nature à la liberté du physicien ; voilà ce qu’il ne saurait créer ou changer, voilà ce qui reste identique pour tous ceux qui se placeront dans des conditions identiques. On ne saurait demander davantage, on ne comprendrait même pas ce qu’on pourrait demander de plus pour l’objectivité de la physique.

La science physique, qu’on adopte les idées énergétistes ou celles des mécanistes, doit permettre à tous les physiciens d’arriver à des résultats identiques et de communiquer ces résultats à tous. Elle est objective, au même titre que notre représentation du monde extérieur, c’est-à-dire au même titre que tout ce que nous appelons une existence ou un objet.

Peu importe que dans certaines conceptions, la théorie ne soit pas un décalque de l’expérience ; comme elle fait nécessairement appel à l’hypothèse, ceci est affaire d’interprétation. Mais ce qui n’est pas affaire d’interprétation, c’est ce que pose l’expérience et que doit toujours finalement représenter toute théorie physique valable.

On n’a donc pas le droit de tirer des vues des savants contemporains, quels qu’ils soient, — à plus forte raison des savants qui les ont précédés — cette conclusion que la physique est constituée par des théories purement spéculatives.

6. — C’est qu’en effet, si l’on y réfléchit bien et en accordant à l’idéalisme, au subjectivisme, tout ce qu’il peut demander, l’objet ne consiste, au point de vue psychologique, comme au point de vue philosophique, pour s’en tenir aux données positives, qu’en un système de relations cohérent et fixe. Toute perception, et, au-dessous de la perception, toute image de rêve, si confuse et si élémentaire