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L’ANALYSE DES DOCTRINES.

Or, la plupart des reproches superficiels qu’on a faits au mécanisme, à la science mécaniste et même à la science tout court, sont tirés de l’emploi des modèles mécaniques. On a assimilé explication mécaniste, mécanisme et modèle jnécanique. On a même assimilé explication scientifique et jnodèle mécanique.

Cependant les mécanistes modernes ont multiplié les précautions contre cette méprise. Ils ont tenu à cœur de anontrer que ces modèles mécaniques n’ont rien qui puisse ieur faire jouer le rôle des constructions métaphysiques de J’ancien mécanisme. Ils leur ressemblent par leur aspect général, leur physionomie. Mais tandis que dans l’ancien mécanisme, la forme des éléments figurés, détails par détails, les enchaînements qui reliaient ces éléments, leurs jeux et leurs réactions réciproques avaient pour but de reconstituer la nature jusque dans ses moindres parties, et de nous faire pénétrer dans le laboratoire de la création, les rouages et les articulations des modèles mécaniques n’ont d’autre ambition que d’apporter un secours temporaire à l’esprit du savant, que de rendre claires pour lui et rep’résentables aux autres certaines propriétés, cerlaines lois des phénomènes[1].

Cela nous explique ce que nous devons entendre quand nous disons que toute théorie mécaniste doit s’appuyer sur des éléments figurés et la valeur exacte de ces éléments. Dans le mécanisme, il est nécessaire qu’il y ait des éléments figuratifs. Mais dès qu’on entre dans le détail, il n’est plus nécessaire, actuellement du moins, que ces éléments aient telle figure plutôt que telle autre.

c) Ce qui remplace dans le mécanisme nouveau les constructions de l’ancien mécanisme, c’est la démons-

  1. « Il me semble que le vrai sens de la question : Comprenons-nous ou ne comprenons-nous pas un sujet particulier de physique ? est celui-ci : Pouvons-nous faire un modèle mécanique correspondant ?… Je ne suis jamais satisfait, tant que je n’ai pas pu faire un modèle mécanique de l’objet ; si je puis faire un modèle mécanique, je comprends : tant que je ne puis pas faire un modèle mécanique, je ne comprends pas. » (W. Thomson : Lectures on molecular dynamics, p. 132.)