Page:Rey - La théorie de la physique chez les physiciens contemporains, 1907.djvu/318

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
296
L’ANALYSE DES DOCTRINES.

gouverneraient toujours les phénomènes qu’elles gouvernent actuellement. Et puis, c’est par une série d’extensions généralisatrices de la mécanique actuelle, extensions rendues possibles par les découvertes qu’elle a suggérées, les tentatives d’explications qu’elle a apportées, c’est par son devenir normal à partir des premiers éléments qu’elle a posés et qui, historiquement, devaient l’être parce qu’ils résumaient les cas privilégiés les plus simples, qu’on se serait élevé à cette systématisation nouvelle. Enfin la notion du mouvement resterait toujours le centre du nouvel édifice. La notion de mouvement ? Il serait même plus précis de dire « la représentation de mouvement », car il s’agit d’images perceptives et non de notions conceptuelles.

La physique électronique est une théorie figurative et une théorie cinétique. Elle reste en continuité avec la mécanique, parce qu’elle considère que son objet est homogène avec celui de la mécanique. « C’est une théorie mécanique puisqu’elle fait intervenir des forces, des déplacements, des vitesses, des accélérations, sous des formes analytiques qui sont celles de la mécanique rationnelle. Mais c’est une mécanique généralisée, car l’inertie et la force vive n’y sont plus liées à des masses pondérables, et la mécanique des corps pondérables n’en serait qu’un cas particulier[1]. » Le mécanisme évolue en même temps que l’expérience transforme l’explication des phénomènes mécaniques.

Le nouveau mécanisme pousse donc jusqu’à ses dernières limites la logique de son empirisme. À mesure que l’on s’éloigne des faits particuliers, les généralisations doivent prendre un caractère hypothétique, vague et plus ou moins mal assuré. Ce qui est solide, c’est l’expérience ; ce qui devient aléatoire, ce sont les généralisations que, sur la foi de l’expérience certes, mais dépassant de beaucoup ce qu’elles pourraient strictement permettre d’affirmer, nous sommes conduits à tenter par les nécessités de la méthode heuristique. Lors donc que l’on prétend retrou-

  1. Lippmann, préface à la Théorie moderne des phénomènes physiques de Righi, p. 4.