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L’ANALYSE DES DOCTRINES.

tains philosophes peu savants, ou de certains savants peu philosophes. L’atomisme devint la pierre angulaire du mécanisme[1], tel qu’on l’expose dans la première moitié du XIXe siècle, et tel qu’on l’expose encore trop souvent, de seconde et même de troisième main.

8. — C’est oublier que le mécanisme est un genre qui comprend plusieurs espèces : l’atomistique tel que le décrit Stallo en est une, la physique des tourbillons telle qu’on la trouve dans certaines conceptions d’Helmholtz et dans la conception de lord Kelvin en est une autre, l’atomistique complété de l’hypothèse des forces centrales en est une troisième. La première considérerait comme principes élémentaires irréductibles, la masse distribuée d’une façon homogène par atomes isolés et le mouvement ; la seconde, un fluide continu en mouvement, la masse étant créée par le mouvement tourbillonnaire du fluide ; la troisième, la masse, la force et le mouvement. Hirn, qui a lutté contre l’atomistique et a vu l’avenir de la physique dans un dynamisme, ne croyait pas sortir de la grande route du mécanisme. Au contraire, il croyait aplanir cette route ; Clausius, égalelnent partisan énergique de la notion de force, de même. D’autre part, Kirchhoff en supprimiànt la notion de force, et Hertz en poursuivant cette suppression dans des domaines négligés par Kirchhoff, et en réalisant un système adynamique, n’avaient d’autre but que de faire progresser une physique mécaniste. Boltzmann, en épurant, après Maxwell, la théorie cinétique des gaz, ne poursuit pas une autre fin. Helmholtz et surtout lord Kelvin et les autres physiciens anglais, qu’ils soient partisans d’unç matière continue ou discontinue, qu’ils maintiennent l’hypothèse des forces centrales ou la proscrivent, se croient dans la pure tradition mécaniste. Purs mécanistes, et à certains points de vue, plus mécanistes que quiconque, et représentant l’aboutissant du mécanisme, ceux qui, à la suite de Lorentz et de Larmor, formulent une théorie électrique de la matière et arrivent à nier la constance de la

  1. Stallo, La matière et la Physique moderne, p. 12.