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L’ANALYSE DES DOCTRINES.

ceux qui se recommandaient le plus manifestement du mécanisme, des hypothèses figuratives fort compliquées pour rendre compte de certains phénomènes. Mais outre que ces hypothèses figuratives n’ont jamais rien eu de définitif, elles ne jouent qu’un rôle très partiel et ne concernent que des détails très spécialisés. Si au lieu de ces particularités, nous regardons, — ce qui est essentiel dans toute théorie systématisatrice, — les grandes lignes, l’assiette, le développement général, nous ne pouvons qu’être frappés de la simplicité et de la clarté, avec laquelle le mécanisme s’établit comme l’aboutissant nécessaire de l’expérience.

21. — On a l’habitude d’unir dans une même formule l’unité et la simplicité de la nature. L’expression est devenue classique. Et en un sens, il apparaît à première vue qu’elle est fondée et légitime. Si les phénomènes peuvent être considérés comme les complications successives d’éléments analogues, n’en résulle-t-il pas que la complexité manifestée par les phénomènes se résout en une simplicité réelle î Puisque les conditions auxquelles nous remontons, les causes, sont moins complexes, moins nombreuses que les conditioimés et les effets, puisque l’hétérogène se réduit à l’homogène, la nature est simple.

Au xviiie siècle, les partisans du mécanisme, de l’hypothèse des forces centrales ont cru fermement non seulement en l’unité et l’homogénéité de la nature, mais encore en sa simplicité intégrale, c’est-à-dire à la simplicité de tous les phénomènes physico-chimiques. De ce que les lois fondamentales, les principes sont simples, on en concluait arbitrairement, faussement, que toutes les lois étaient simples.

Or, lorsque après environ un siècle de travaux, on se trouva amené par la force des choses à reconnaître que si la contexlure des phénomènes recouvrait peut-être des éléments homogènes, cette contexture était d’une complication inouïe ; qu’on ne la pouvait déjouer qu’en recourant à une méthode statistique, comme dans la théorie cinétique des gaz, ou — ce qui revient au même — en abandonnant le détail pour fixer les grandes lignes de l’en-