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L’ANALYSE DES DOCTRINES.

que le mécanisme pourrait invoquer aussi bien et souvent mieux que les autres interprétations de la physique théorique, ne lui paraîtraient pas suffisantes. Il ne suppose pas que la connaissance de la nature doit être dirigée pour satisfaire quand même la raison. Il n’y a de connaissance que celle que l’expérience nous impose. C’est donc parce que l’expérience nous a fait, jusqu’à présent, retomber sur ces éléments, c’est parce que toute représentation, toute perception sensible se laisse décomposer jusqu’à ces éléments, et recomposer à partir de ces éléments, c’est parce que l’analyse et la synthèse sont objectivement représentables avec eux et ne sont objectivement représentables qu’avec eux, que nous avons le droit et l’obligation de les poser comme les éléments primordiaux de la théorie physique :

« L’esprit humain, en observant les phénomènes naturels, y reconnaît, à côté de beaucoup d’éléments confus, qu’il ne parvient pas à débrouiller, un élément clair, susceptible par sa précision d’être l’objet de connaissances vraiment scientifiques. C’est l’élément géométrique tenant à la localisation des objets dans l’espace et qui permet de se les représenter, de les dessiner ou de les construire d’une manière au moins idéale. Il est constitué par les dimensions et les formes des corps ou des systèmes de corps, par ce qu’on appelle, en un mot, leur configuration à un moment donné. Ces formes, ces configurations dont les parties mesurables sont des distances ou des angles, tantôt se conservent du moins à peu près, pendant un certain temps et paraissent même se maintenir dans les mêmes régions de l’espace pour constituer ce qu’on appelle le repos, tantôt changent sans cesse, mais avec continuité, et leurs changements de lieu sont ce qu’on appelle le mouvement local ou simplement le mouvement[1]. »

Certes, encore une fois, il n’est pas vrai que la physique soit arrivée à tout réduire à des figures et à des mouvements. Mais de ce qu’elle n’y est pas encore arrivée, il

  1. Boussinesq : Leçons synthétiques de mécanique générale, p. 1.