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CONTINUATEURS DU MÉCANISME, HYPOTHÈSES FIGURATIVES.

Mais peu à peu, les développements de la physique mathématique la spécialisèrent, car ils exigeaient des spécialistes, des mathématiciens et des analystes. Alors commença la période formelle, c’est-à-dire la physique mathématique, purement mathématique, la physique mathématique, non plus branche de la physique, si on peut ainsi parler, mais branche.de la mathématique, cultivée par des mathématiciens. Nécessairement dans cette phase nouvelle, le mathématicien habitué aux éléments conceptuels qui fournissent la seule matière de son œuvre, gêné par les éléments grossiers, matériels, qu’il trouvait peu malléables, dut tendre toujours à en faire le plus possible abstraction, à se les représenter d’une façon tout à fait immatérielle et conceptuelle, ou même à les négliger complètement.

Les éléments, en tant que données réelles, objectives, et pour tout dire, en tant qu’éléments physiques disparurent finalement. On ne garda que des relations formelles représentées par les équations différentielles. Il n’y eut plus d’objectif et de réel que des rapports ; rien ne rappelle la physique sinon les lois physiques que, dans un autre monde, découvraient les expérimentateurs. Certes, à qui se donne la peine de suivre la filière, depuis le laboratoire du physicien jusqu’au cabinet du mathématicien, cela est un fondement et un garant suffisants d’objectivité. La physique mathématique est bien de la physique. Mais si on se préoccupe peu de cette filière, ou si, se hâtant de prendre les résultats, on néglige la voie par laquelle on les a trouvés, on ne voit plus dans l’expression double de physique mathématique que son second terme. Et si le mathématicien n’est pas dupe de son travail constructif, si, lorsqu’il analyse la physique théorique telle qu’elle sort de son cerveau, il sait bien retrouver ses attaches à l’expérience, et sa valeur objective, à première vue, et pour un esprit non prévenu, on croit se trouver en face d’un développement arbitraire.

L’aspect inductif disparaît aussi. Les éléments primordiaux deviennent des principes abstraits, des formes extrêmement générales. Le concept, la notion a remplacé par-