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L’ANALYSE DES DOCTRINES.

dans la seconde moitié du xixe siècle n’est que le développement des tendances générales de la science moderne. Elle apporte, en somme, à la physique classique les modifications qui paraissent nécessaires à son progrès, les corrections réclamées pour avancer plus loin, mais dans la même direction générale. C’est dans ce sens que la critique a attaqué le mécanisme ou mis en garde contre lui.

Les résultats de la critique ont été très importants ; ils ont encore été amplifiés par le bruit énorme que l’on a fait autour d’elle. On l’a exploitée, habilement contre l’esprit moderne, contre la science dont on a voulu discréditer la valeur objective pour des préoccupations d’ordre social. Au bénéfice du fidéisme, on l’a répandue, dans le grand public, en taisant tout ce qui, dans son œuvre même, eût pu y faire un contre-poids. Malgré tout, l’historien est obligé de constater que la grande majorité des physiciens, la presque unanimité des travailleurs de laboratoire sont restés fidèles au mécanisme.

Il ne paraît pas que les critiques des philosophes et des littérateurs, voire les réserves des mathématiciens ou des physiciens réformateurs, aient beaucoup troublé leur quiétude. Il faut ajouter que cette quiétude avait sa raison d’être, car la physique continuait ses découvertes, et par celles-ci son action objective sur la nature ; presque tous les découvreurs et les techniciens de valeur se trouvaient être mécanistes. À mesure qu’on parlait, soit de la faillite de la conception traditionnelle de la science depuis la Renaissance, soit des dangers du mécanisme pour cette science elle-même, les physiciens, en partant d’hypothèses mécanistes avouées, en cherchant une théorie mécanique des phénomènes ou une systématisation mécaniste de la nature, ajoutaient tous les jours à l’acquis scientifique. Et il n’y avait à peu près qu’eux seuls pour y ajouter, si bien que l’histoire du mécanisme, c’est encore, sauf des exceptions rares et bien partielles, l’histoire de la physique.

Seulement l’impartialité historique — et à son défaut le simple bon sens — forcent d’un autre côté à constater que le mécanisme est allé se transformant, et évoluant à son