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DÉLIMITATION DU PROBLÈME

vertes et des théories, ou la monographie des savants, chercher la filiation des découvertes et des théories, ou les influences réciproques des savants, considérer le rapport du développement scientifique avec les besoins du milieu naturel et social, avec l’histoire de la civilisation et même les exigences de la pensée.

On peut ensuite essayer de faire l’histoire de l’esprit scientifique, de l’atmosphère dans laquelle a été créée et développée la science.

Les travaux et les monographies concernant la première question sont nombreux ; les savants se sont chargés eux-mêmes la plupart du temps de nous renseigner très utilement non seulement par des mémoires spéciaux, mais encore par des travaux d’ensemble plus ou moins étendus. Peut-être serait-il à désirer que ces travaux fussent faits avec une meilleure méthode historique, et mieux reliés à l’histoire générale, et surtout à l’histoire économique. Mais enfin, on a, à tout le moins, des matériaux nombreux, sûrs, une excellente documentation de première main.

Il en est tout à fait autrement du second problème, surtout pour la période contemporaine.

Les histoires de la philosophie grecque, de la pensée grecque, les histoires de la philosophie de la Renaissance, nombreuses et remarquables, se sont chargées, on peut dire à peu près complètement, encore qu’il serait désirable d’avoir des travaux plus méthodiquement spécialisés vers cet objet, de nous renseigner sur l’esprit scientifique de l’antiquité classique et de la Renaissance. Les savants de l’antiquité grecque et les savants de la Renaissance sont les philosophes de l’antiquité grecque et les philosophes de la Renaissance ; cela explique que l’esprit scientifique se soit développé en corrélation intime avec l’esprit philosophique et que l’histoire de l’un soit aussi l’histoire de l’autre. Il serait absolument artificiel et ce serait préparer toutes espèces de méprises et d’erreurs que de faire l’histoire de l’esprit scientifique en l’isolant de l’esprit philosophique.

Mais, déjà à partir du xviiie siècle la science et la philosophie s’engagent de plus en plus dans les voies diver-