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CRITIQUE DU MÉCANISME : L’ATTITUDE SIMPLEMENT CRITIQUE.

rie mécanique. « En résumé, les phénomènes anciennement connus se classent de mieux en mieux ; mais des phénomènes nouveaux viennent réclamer leur place ; la plupart d’entre eux, comme celui de Zeemann, l’ont trouvée tout de suite. » Quant aux autres, « je ne crois pas qu’ils détruiront l’unité générale, je crois plutôt qu’ils la compléteront ». D’autre part, les radiations nouvelles semblent nous montrer de véritables particules matérielles (ions, électrons, corpuscules). En résumé, malgré les découvertes de phénomènes nouveaux ou d’aspects imprévus dans les phénomènes anciens, « les cadres ne sont pas rompus ; les rapports que nous avions reconnus entre des objets que nous croyions simples, subsistent encore entre ces mêmes objets quand nous connaissons leur complexité, et c’est cela seul qui importe. Nos équations deviennent de plus en plus compliquées, c’est vrai, afin de serrer de plus près la complication de la nature ; mais rien n’est changé aux relations qui permettent de déduire ces équations les unes des autres. En un mot la forme de ces équations a résisté[1]. »

« De ce rapide exposé, que conclurons-nous ? Tout compte fait, on s’est rapproché de l’unité ; on n’a pas été aussi vite qu’on l’espérait il y a cinquante ans, on n’a pas toujours pris le chemin prévu ; mais, en définitive, on a gagné beaucoup de terrain[2]. »

D’ailleurs, et cette affirmation de Poincaré est capitale, pour indiquer nettement la position qu’il prend, le progrès vers l’unité est une condition nécessaire de la possibilité de la science[3].

Cette constatation des progrès de la thèse essentielle du mécanisme traditionnel, l’unité des phénomènes naturels

  1. Id., p. 210, 211, 191, et Revue de Métaphysique, mai 1902, p. 291.
  2. Science et hypothèse, p. 212.
  3. Poincaré (Science et hypothèse, p. 202, 203) a remarqué que deux tendances inverses se manifestent dans l’histoire du développement de la physique : une tendance vers l’unité, par la découverte de liens nouveaux entre des phénomènes épars, une tendance vers la discrimination par la découverte de phénomènes nouveaux qui viennent rompre certains liens présumés. De ces deux tendances inverses, laquelle l’emportera ? « Si c’est la première, la Science est possible. » (p. 203.)