Page:Rey - La théorie de la physique chez les physiciens contemporains, 1907.djvu/230

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
208
L’ANALYSE DES DOCTRINES.

et par suite trop vague. Les nouveaux principes, résultat des découvertes nouvelles, imposées par l’expérience qui n’a pas infirmé les anciens (il faut se rappeler qu’ils ne peuvent être faux en eux-mêmes) sont féconds et nécessaires dans certains domaines où les autres restaient stériles, inaptes à enchaîner des relations nouvelles entre des faits nouveaux.

On retrouve là sans peine le résultat de la critique précédente sur la validité des principes. Du même coup, on voit que les premiers posés ne sont pas infirmés ; que le mécanisme est complété, qu’il n’est pas ruiné.

Si la théorie énergétique présente ainsi pour Poincaré certains avantages sur le mécanisme classique, si elle doit, par conséquent, s’y superposer, elle n’est pas considérée comme une théorie d’essence différente et qui va changer les destinées de la physique ; elle n’est pas la perfection succédant au chaos. Elle est un progrès, un complément et voilà tout. La preuve en est que Poincaré en fait une critique absolument semblable à celle à laquelle il a soumis la mécanique classique[1]. Et il arrive à des conclusions identiques.

Les nouveaux principes sont de même nature que les principes newtoniens[2] ; le principe de moindre action, auquel Poincaré rattache étroitement l’énergétisme ne paraît pas avoir une extension illimitée ; car ce principe n’est nullement satisfaisant en ce qui concerne les phénomènes irréversibles[3]. Et c’est au nom du mécanisme, pour rejeter toutes les traces de finalisme, et de théorie qualitative, que Poincaré trouve que l’énoncé du principe de moindre action a quelque chose de choquant pour l’esprit.

« L’énoncé même du principe de moindre action a quelque chose de choquant pour l’esprit. Pour se rendre d’un point à un autre, une molécule matérielle, soustraite à l’action

de toute force, mais assujettie à se mouvoir sur une sur-

  1. « Les définitions des deux sortes d’énergie soulèveraient des difficultés presque aussi graves que celles de la force et de la masse dans le premier système. » (Science et hypothèse).
  2. Science et hypothèse, p. 153, 154.
  3. Id., p. 154.