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iv
PRÉFACE


2. — CONCLUSIONS QUE CE TRAVAIL SEMBLE AUTORISER


À l’aide de cette méthode, je dis tout de suite que, parti d’abord avec l’idée que la science physique était une construction arbitraire et contingente, parce que cette idée était dans l’air et que l’intellectualisme et le rationalisme se trouvaient assez méprisés par ma génération, je suis arrivé à des vues absolument opposées en cherchant, aussi scrupuleusement que je le pouvais, ce que pensaient les physiciens de la physique. J’ai cru pouvoir établir comme conclusions de cette contribution à l’histoire et à la logique des sciences :

1o Que tous les physiciens admettaient un fonds sans cesse accru de vérités nécessaires et universelles.

    Ce travail répond à la conception de la philosophie que j’indique ici, et que je développerai dans l’introduction qui va suivre : la philosophie, continuation et prolongement des sciences, — non point seulement synthèse, au sens positiviste du mot, mais généralisation dégageant, par une méthode positive des données fournies à chaque instant par les sciences, ce que l’homme peut apercevoir ou supposer touchant la nature de la connaissance ou la nature des choses.

    Il ne s’agit ici que de la première de ces deux tâches, par rapport aux données qu’apporte la science physique. Je compte tenter la seconde — plus complexe encore — et déterminer ce que la philosophie de la nature, la théorie de la matière peut et doit demander à la science physique. Il faudra examiner l’esprit général de cette science, non plus au point de vue de sa forme et de sa méthode, mais au point de vue de son contenu général, établir ses lois les plus compréhensives, c’est-à-dire ses principes fondamentaux et ses hypothèses sur la constitution des phénomènes physiques, — toujours à la suite des savants, bien entendu.

    On peut remarquer qu’un travail analogue (il est déjà poursuivi depuis quelque temps d’une façon assez systématique pour la mathématique) pourra être exécuté en ce qui concerne les autres sciences. Ainsi pourront être rassemblés les éléments d’une philosophie vraiment positive. Celle-ci sortirait alors dans une certaine mesure de la période des systèmes individuels, et s’appuierait sur un travail collectif. Elle se rapprocherait de l’aspect général de tout savoir positif, au moins dans sa substructure, et en faisant abstraction des interprétations personnelles qui, vraisemblablement, achèveront toujours, dans le domaine du sentiment et de la croyance, la métaphysique. Elle progresserait, comme la science, par collaborations simultanées et successives.