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L’ANALYSE DES DOCTRINES.

de la mathématique sans songer à la réformer ou à lui substituer autre chose[1].

  1. La position de Poincaré en face du mécanisme est nettement définie par ces quelques lignes qu’il a placées en tête de son ouvrage : La théorie de Maxwell et les oscillations hertziennes : « Donner des phénomènes électriques une explication mécanique complète, réduisant les lois de la physique aux principes fondamentaux de la dynamique, c’est là un problème qui a tenté bien des chercheurs. N’est-ce pas cependant une question un peu oiseuse et où nos forceô se consumeraient en pure perte ?

    Si elle ne comportait qu’une seule solution, la possession de cette solution unique, qui serait la vérité, ne saurait être payée trop cher. Mais il n’en est pas ainsi : on arriverait sans doute à inventer un mécanisme donnant une imitation plus ou moins parfaite des phénomènes électrostatiques et électrodynamiques. Mais, si l’on peut en imaginer un, on pourra en imaginer une infinité d’autres.

    Il ne semble pas, d’ailleurs, qu’aucun d’entre eux s’impose jusqu’ici à notre choix par sa simplicité. Dès lors, on ne voit pas bien pourquoi l’un d’eux nous ferait, mieux que les autres, pénétrer le secret de la nature. Il en résulte que tous ceux que l’on peut préparer ont je ne sais quel caractère artificiel qui répugne à la raison.

    L’un des plus complets avait été développé par Maxwell, à une époque où ses idées n’avaient pas encore pris leur forme définitive. La structure compliquée qu’il attribuait à l’éther rendait son système bizarre et rébarbatif ; on aurait cru lire la description d’une usine avec des engrenages, des bielles transmettant le mouvement et fléchissant sous l’effort, des régulateurs à boules et des courroies. Quel que soit le goût des Anglais pour ce genre de conceptions dont ils aiment l’apparence concrète, Maxwell fut le premier à abandonner cette théorie saugrenue qui ne figure p€is dans ses œuvres complètes. On ne doit pas regretter cependant que sa pensée ait suivi ce chemin détourné puisqu’elle a été ainsi conduite aux plus grandes découvertes.

    En suivant la même voie, il ne semble pas qu’on puisse faire beaucoup mieux. Mais s’il est oiseux de chercher à se représenter dans tous ses détails la mécanique des phénomènes électriques, il est très important au contraire de montrer que ces phénomènes obéissent aux lois générales de la mécanique.

    Ces lois en effet sont indépendantes du mécanisme particulier auquel elles s’appliquent. Elles doivent se retrouver invariables à travers la diversité des apparences. Si les phénomènes électriques y échappaient on devrait renoncer à tout espoir d’explication mécanique. S’ils y obéissaient, la possibilité de cette explication est certaine, et on n’est arrêté que par la difliculté de choisir entre toutes les solutions que le problème comporte.

    Mais comment nous assurons-nous, sans déployer tout l’appareil de l’analyse mathématique, de la conformité des lois de l’électrostatique et de l’électrodynamique avec les principes de la dynamique ?

    C’est par une série de comparaisons. Quand nous voudrons ana-