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L’ANALYSE DES DOCTRINES.

comme il le dit, de la pratique quotidienne du laboratoire, et ce qui est tendance métaphysique, philosophie des sciences. Au point de vue philosophique, en effet, il y a une analogie incontestable entre la forme donnée à la théorie physique conceptuelle telle qu’il la conçoit, et la forme de la physique qualitative du péripatétisme. Mais, dans ses dernières publications sur la question, revenant sur certaines expressions équivoques, il a montré, aussi distinctement qu’on peut le souhaiter, qu’il n’y a qu’une analogie, et une analogie de forme ; et encore cette analogie doit-elle préoccuper le seul métaphysicien : le physicien n’a même, pas à poser la question.

La signification des concepts, des formes employées par la physique nouvelle est, en effet, tout autre que dans la physique scolastiquô. C’est une signification quantitative ; et la théorie pliysique, comme dans toute la réforme nouvelle, se rattache directement aux idées de la Renaissance, en ce qu’elle est avant tout un mathématisme.

Duhem insiste trop fréquemment sur l’évolution de la physique, sur l’absence de révolution dans tout le cours de son développement, pour qu’on puisse seulement douter qu’il ne considère les idées de la Renaissance comme nécessaires au développement de la science et comme pleinement efficaces.

La science a alors quitté pour toujours le monde des essences spécifiques, des qualités occultes, expliquant le réel par l’abstrait. Si Duhem critique le mécanisme traditionnel, n’est-ce pas parce qu’il garde trop à son gré de cette tendance stérile à réaliser les abstractions, à donner un corps à des généralités mortes ?

Les phénomènes ne sont plus séparés par des cloisons étanches en espèces incommensurables. Le spécifique, le qualitatif de la connaissance vulgaire, catalogué par la dialectique syllogistique ne doit plus nous empêcher de voir les rapports entre les phénomènes (les lois naturelles de la science moderne), et leur homogénéité fondamentale. Tout ce qu’on doit maintenir, c’est de ne pas aller plus vite dans cette komologation de la nature que ne l’autorise l’ex-