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L’ANALYSE DES DOCTRINES.

condition sine qua non de l’admission des conventions proposées.

L’hypothèse parfaite serait celle qui serait une simple traduction en langage mathématique, des lois physiques dont on veut représenter l’ensemble, à condition que cette traduction forme un tout logique absolument cohérent. Aucune théorie physique ne réalise pleinement cet idéal. Et les théories que l’on a bâties présentent tous les degrés entre les mauvaises hypothèses et l’hypothèse idéale, sans jamais se confondre avec cette dernière : « On peut mettre en fait que quelque vaste et sûre que soit une théorie physique, lorsqu’on la pousse suffisamment loin, elle aboutit toujours à des conséquences contraires à l’expérience. » La valeur des théories reste donc dans une certaine mesure relative ; mais on peut discuter de la valeur d’une théorie, de son degré d’objectivité, tandis que dans la critique empiriste pure on les proscrit absolument toutes connue sans contact avec la réalité, et que dans la critique néo-idéa1iste, on les admet également toutes, comme subjectives, ce qui ressemble beaucoup en fin de compte à l’empirisme pur. Duhem au contraire admet en même temps que la nécessité de l’hypothèse, des critériums de validité et une échelle de valeurs.

La théorie physique n’est donc pas œuvre indifférente, ou négligeable : elle répond à un besoin et doit satisfaire à des conditions données : « La théorie physique est une construction symbolique de l’esprit humain destinée à donner une représentation, une synthèse aussi complète, aussi simple et aussi logique que possible des lois que l’expérience a découvertes… Lorsqu’un grand nombre de ces conséquences théoriques représentent d’une manière très approchée un grand nombre de lois expérimentales, la théorie est bonne[1]. »

7. — L’œuvre originale de Duhem a été de montrer dans la réforme nouvelle l’utilité et la part nécessaire de la théorie physique, en même temps que son autonomie relative,

  1. Duhem, Les théories électriques de Maxwell (Revue des questions scientifiques du 20 janvier 1901).