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L’ANALYSE DES DOCTRINES.

mum. D’ailleurs, aux températures suffisamment basses, ce symbole que la thermodynamique nomme un gaz parfait n’est plus l’image, même approchée, d’aucun gaz réel.

« Ces difficultés et bien d’autres qu’il serait trop long d’énumérer, s’évanouissent si l’on prend garde aux remarques que nous avons formulées. Dans la construction de la théorie, la discussion dont nous venons de parler n’est qu’un intermédiaire ; il n’est point juste de lui chercher un sens physique[1].

« Formalisme mathématique », voilà, semble-t-il, l’expression qui convient bien à caractériser la conception de Duhem.

4. — b) Mais il ne faudrait pas croire que ce formalisme mathématique qui se construit sans appel à l’observation des phénomènes naturels n’ira pas rejoindre ces phénomènes. Duhem veut construire un système plus adéquat que celui qu’il a critiqué. Au terme donc, notre jeu de formules nous donnera les moyens de prévoir des transformations réelles physiques ou chimiques. Les résultats devront coïncider avec la réalité. Le formalisme mathématique est un moyen et non un but : « c’est un principe que l’on ne doit jamais perdre de vue si l’on veut éviter les abus de la physique mathématique[2] »,

« Lorsque l’édifice est parvenu au faîte, il devient nécessaire de comparer à l’ensemble des faits d’expérience l’ensemble des propositions obtenues comme conclusions de ces longues déductions ; il faut s’assurer, moyennant l’emploi des procédés de mesure adaptés, que le premier ensemble trouve dans le second une image suffisamment ressemblante, un symbole suffisamment précis et complet. Si cet accord entre les conclusions de la théorie et les faits d’expérience ne se manifeste pas avec une approximation satisfaisante, la théorie pourrait bien être logiquement construite, elle n’en devrait pas moins être rejetée parce qu’elle

  1. Duhem, L’évolution de la mécanique (Revue générale des Sciences, 1903, p. 304).
  2. Duhem, Revue des questions scientifiques, 1892, p. 173.