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L’ANALYSE DES DOCTRINES.

ceptuelles, un formulaire mathématique de description, selon les idées théoriques de Mach, réalisait une physique plus expérimentale, plus réaliste, plus objective qu’elle ne l’avait jamais été, surtout avec le mécanisme.

Les représentations proposées par Ostwald ne doivent, en effet, d’après lui, « contenir rien de plus, rien de moins que les faits à représenter[1]. »

« J’ai insisté déjà sur ce que les théories mécaniques usuelles ne satisfont pas à cette condition ; et j’ai des raisons de croire que, par essence même, elles ne peuvent jamais y satisfaire. Il m’est malheureusement impossible d’exposer ici ces raisons avec tout le développement nécessaire ; mais je puis en indiquer la tendance. Comme on le sait, on distingue, depuis Hamilton, deux espèces de grandeurs physiques : les scalaires et les vecteurs. Ces deux espèces de grandeurs sont de nature essentiellement différente, et l’on ne peut jamais représenter l’une par l’autre. Je suis persuadé qu’il existe un plus grand nombre de grandeurs d’essence différente ; et je me crois fondé à admettre que les diverses formes de l’énergie sont caractérisées toutes par des grandeurs, possédant une telle individualité. Que cela soit confirmé, et le fait que la mécanique n’a pu donner, jusqu’à présent, une image complète de la nature, apparaîtra comme une nécessité[2] ».

5. — L’expérimentalisme de la nouvelle physique est même à ce point « réaliste » qu’Ostwald se croit le droit de dire que les restrictions apportées à la légitimité comme à l’étendue des conclusions de la physique tombent d’ellesmêmes : la science physique est non seulement une connaissance objective, elle est la connaissance objective. Par rapport à son objet, elle est la science de cet objet au sens grec du mot. Bien entendu, il ne s’agit pas d’une objectivité transcendante au point de vue humain. Les questions qui ne sont pas du domaine de l’expérience, donc du domaine dont l’homme est la mesure, restent hors

  1. Id., p. 957.
  2. W. Ostwald, Lettre sur l’Énergétique (Revue générale des Sciences, 1895, p. 1070).