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L’ANALYSE DES DOCTRINES.

sur une relation générale, c’est que cette relation était hypothétique. Ou bien la relation nouvelle, tout en laissant debout les anciennes, est incompatible avec elle. C’est là le cas le plus ordinaire, c’est aussi le plus intéressant, car tenant les deux bouts de la chaîne, tous deux du même métal, il s’agit de retrouver les chaînons intermédiaires. Il faut alors poursuivre l’analyse et découvrir de nouvelles relations ; on doit tout au moins les conjecturer et chercher la vérification expérimentale de cette conjecture. On prépare à la science de nouveaux triomphes pour continuer les anciens. L’expérience va en s’élargissant, car elle est toujours trop étroite, mais elle ne se dément pas.

L’analyse des sensations, l’abstraction et la généralisation qu’elles postulent, le principe d’épargne de la pensée par lequel elle se laisse diriger, n’est pas une idéologie Imaginative que nous substituons au réel, c’est la pénétration progressive du réel, tel qu’il se manifeste à nos sens. L’énergie est pour l’énergétique une relation sensible et réelle par excellence : « Vous recevez un coup de bâton, dit Ostwald ; que ressentez-vous, le bâton ou l’énergie ? »

Duhem, en parlant d’Ostwald, semble croire que sa théorie est le dernier terme de l’abstraction des théories physiques :

« On pourrait pousser l’assimilation encore plus loin et certains l’ont osé. Puisque le fluide de W. Thomson n’a d’autre propriété que de supporter dans l’espace des vitesses variables, selon certaines formules, pourquoi n’irait-on pas jusqu’à le supprimer, jusqu’à lui dénier toute existence substantielle, jusqu’à le réduire à la pure étendue ? La masse de l’atome-tourbillon, à supposer qu’on en ait trouvé une définition acceptable, ne serait pas la traduction, en langage mathématique, de la persistance d’une substance, matérielle, mais la conséquence d’une certaine distribution permanente de vitesses de rotations ; pour cet atome, il n’est plus vrai de dire que « la loi physique de la conservation de la masse ait dégénéré en un axiome métaphysique, conservation de la matière ». Dès lors, pourquoi attribuerions-nous plus de réalité à la matière même du fluide au sein duquel se forment les tourbillons ? Pour-