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LA CRITIQUE DU MÉCANISME : L’ATTITUDE HOSTILE.

plète, comme la théorie mécanique de la chaleur, d’après Gibbs, par exemple, il n’aura rien fait que doubler les relations réelles d’un second système de relations, celui-là symbolique. Où seront l’économie et l’épargne[1] ? Pourquoi ajouter à chaque relation empirique, une relation symbolique qui ne dira pas autre chose, et le dira toujours d’une façon moins réaliste[2] ?

4. — Il est vrai qu’il existe entre tous les phénomènes naturels et les phénomènes mécaniques, une liaison manifeste. Mais il faut prévenir une illusion grossière. Quand un principe de miécanique permet l’explication de phénomènes physiques, admettant comme variables des quantités qui ne sont pas données dans l’expérience sous forme de mouvements, cela ne veut pas dire que ces variables en dernière analyse recouvrent des mouvements, mais simplement qu’il y a une relation quantitative invariable entre les phénomènes mécaniques et des phénomènes d’autres catégories. Les variables ne sont pas des variables indépendantes dans les relations considérées ; elles dépendent de la variable mouvement, mais elles ne sont nullement des valeurs particulières de cette variable. C’est ce qui explique en particulier le rôle du principe de la conservation de l’énergie qui est une généralisation d’un principe de la mécanique, quand on ne considère que l’énergie potentielle de position, et l’énergie cinétique de mouvement. Mais dans la nature, l’énergie ne se présente pas tout entière sous la forme de positions et de mouvements. Un travail effectué,

  1. Mach, La Mécanique, tr. fr., p. 468.
  2. Les mécanistes ont répondu d’ailleurs sur ce point à leurs adversaires, qu’une hypothèse « peut faciliter considérablement l’intelligence de faits nouveaux en leur substituant des idées déjà familières, et son efficacité est dès lors prouvée » (Mach, La Mécanique, tr. fr., p. 468). Aucun énergétiste, à ma connaissance, n’a répondu d’une façon convaincante à cette contre-objection. Mach se contente de la reproduire sans essayer sa réfutation, puisque je lui emprunte l’énoncé ci-dessus. Mais apparemment aucun énergôtiste non plus ne l’a trouvée suffisante pour modifier sa critique du mécanisme. L’historien ne peut que constater leur silence sur ce point. La critique pourrait s’y arrêter sérieusement et y trouver un argument capital en faveur des hypothèses mécanistes.