Page:Rey - La théorie de la physique chez les physiciens contemporains, 1907.djvu/100

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
78
L’ANALYSE DES DOCTRINES.

lique regret[1]. » Si la science affranchit de rignorance, certes elle ne peut être une construction arbitraire. Cette phrase implique qu’il y a une vérité objective, que la science a pour fonction de la découvrir et de l’exprimer, enfin que la science seule peut atteindre ce but. D’autre part, si la science est une adaptation de la pensée, c’est une adaptation progressive et croissante, une adaptation qui adapte de mieux en mieux la pensée à l’objet, et dont la réussite va sans cesse en augmentant.

Les formules de Mach que j’ai citées tout à l’heure, ne sont donc pas une critique de la valeur objective de la physique en général, mais seulement de la valeur objective de la physique mécaniste, et c’est pourquoi elles sont parfaitement compatibles avec une doctrine de l’objectivité de la physique et de la science en général.


III. — CRITIQUE d’ENSEMBLE DE LA CONCEPTION MÉCANISTE


1. — L’exposé de l’esprit général de la conception de Mach commence donc nécessairement par une critique d’ensemble du mécanisme. C’est cette critique qui nous amènera insensiblement à la conception positive inébranlable de l’objectivité physique. « L’opinion qui fait de la mécanique la base fondamentale de toutes les autres branches de la physique, et suivant laquelle tous les phénomènes physiques doivent recevoir une explication mécanique, est selon nous un préjugé », dit Mach[2]. Ce préjugé a une origine purement historique. Il vient de ce que les découvertes qui ont servi de base à la mécanique ont été les premières qui aient été effectuées à propos des phénomènes physiques. C’est par les lois de la chute des corps, et les phénomènes de la pesanteur, dans notre petit monde terrestre, c’est par l’examen du mouvement des corps célestes que l’étude de la nature a commencé lors de la Renaissance. Les premières grandes lois physiques, les premiers principes sont tous

  1. Id., p. 429.
  2. Mach, La Mécanique, tr. fr., p. 465.