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DES ÉTRANGERS EN CORÉE.

-Orient, a subi quelques modifications à raison de la différence de pays et de mœurs.

Si l’on compare ces traités aux Capitulations ottomanes, on constate d’abord qu’ils constituent l’unique source des privilèges dont les étrangers jouissent en Extrême-Orient, tandis que dans l’Empire ottoman ces privilèges ont pour origine une concession gracieuse du souverain local et se sont développés et souvent déformés par l’effet de la coutume[1].

De plus, les étrangers n’ont pas, comme en Turquie, le droit de s’établir librement sur tout le territoire ; ils sont fixés dans certaines localités que le Gouvernement leur a assignées comme résidence exclusive. Cette situation a pour conséquence l’inviolabilité absolue du domicile des étrangers ; il n’est pas fait exception à cette règle, comme en Turquie, à raison de leur éloignement de la résidence consulaire.

Ces différences ne constituent même pas des innovations : on retrouve la même situation au Moyen âge chez d’autres peuples qui accordaient aux Européens le privilège d’exterritorialité, les Arabes de l’Afrique septentrionale.

On peut donc dire que la condition juridique des étrangers en Extrême-Orient est, dans ses grandes lignes, la même qu’en Orient. Elle est souvent même mieux définie parce que, l’expérience ayant montré les lacunes et les défauts des Capitulations ottomanes, les États européens ont pu préciser les points contestés en Turquie dans leurs conventions avec les États asiatiques.

Ajoutons que les traités avec la Corée, étant les plus récents de ceux qui fixent la condition des étrangers en Extrême-Orient, sont aussi les plus complets et les mieux rédigés.

Avant d’exposer en détail la situation des étrangers en Corée telle qu’elle résulte des conventions diplomatiques une question préliminaire se pose. À qui s’appliquent les traités passés par les puissances étrangères avec la Corée ? Faut-il en limiter l’effet aux nationaux de ces puissances ou peut-on l’étendre à d’autres personnes, étrangers ou indigènes ?

  1. On peut remarquer que si les Capitulations étaient, à l’origine, des actes unilatéraux, concession gracieuse des Sultans aux Princes chrétiens, elles n’ont plus aujourd’hui ce caractère depuis le traité du 25 juin 1802 qui les a confirmées. Telle est du moins l’opinion générale. V. cependant Arminjon, Origines, sources et nature du droit des Capitulations ottomanes (J. dr. int. pr., 1905, p. 133 et s., 556 et s.).