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LA RÉFORME DE L’ENSEIGNEMENT

nous on rencontre le type, je ne dis pas du vieil écolier mais du vieux collégien. Tel personnage, éloquent et bien doué, portera toute sa vie les marques de la classe de rhétorique. Tel autre a visiblement passé par la classe de spéciales. Il faut bien le dire ; chaque métier a sa pédanterie. Celui de professeur, auquel j’ai du reste l’honneur d’appartenir, a la sienne. Et l’enseignement secondaire est ici de bien plus mauvais conseil que l’enseignement supérieur. »

M. Lippmann, après cet aveu, a félicité l’Association pour la réforme de l’Enseignement d’avoir osé entreprendre une telle besogne en faisant simplement appel à l’opinion et en ne craignant pas d’exclure de son conseil ceux qui, logiquement, sembleraient le plus qualifiés pour y entrer, à savoir : les universitaires, — mais qui, pratiquement, sont le moins à même de contribuer à la transformation d’un domaine où ils ont leurs habitudes et dont ils n’aperçoivent pas toujours les défauts.

M. Lippmann a terminé en remerciant les personnes présentes d’avoir bravé, pour venir, un froid imprévu et sibérien et il a aussitôt donné la parole au conférencier.

Après avoir passé en revue, de façon humoristique, les lacunes que laisse dans le cerveau d’un bachelier l’enseignement secondaire actuel et avoir montré l’inaptitude de cet enseignement à préparer le jeune homme à l’activité et à la vie, M. de Coubertin a commenté le principe même de la réforme en ces termes : « Nous voulons substituer le principe analytique au principe synthétique. Tout le monde sait ce que c’est qu’une synthèse. Puis-je me permettre de le rappeler sous une formule familière ? Quand des doigts féminins préparent une tasse de thé, ils font une synthèse. Du sucre, du thé, de l’eau chaude et de la crème, voilà, Madame, une synthèse. Vous avez pris des éléments distincts en quantités appropriées et vous les avez mélangés intimement… L’enseignement secondaire est, en tous pays, basé sur la synthèse. Il en était ainsi autrefois et la synthèse, assez simple, s’opérait facilement ; il en est ainsi encore, et la synthèse, devenue très complexe, s’opère très mal ou même ne s’opère plus. » M. de Coubertin distingue trois parties, trois « blocs » dans l’enseignement nouveau. La première partie comprendra tout ce qui peut donner au jeune garçon « une connaissance générale du monde matériel au milieu duquel il est appelé à vivre et des forces auquel il est appelé à se servir utilement. » Ce sera en quelque